Rugby champagne
Durant Vinexpo, la grand-messe bisannuelle du vin, journalistes et assimilés croulent sous les invitations à déguster, à déjeuner, à découvrir. Les événements, coordonnés et relayés par des attachées de presse toutes plus charmantes les unes que les autres, se succèdent ou parfois se chevauchent (non, les événements…).
Ce matin-là, après deux visites sur des stands amis, j’ai pris du retard. Je dois malheureusement faire mon deuil des accords fromages-portos qui me tentaient bien. Il est midi et une amie (une belle rousse) qui voulait me faire connaître les mérites d’une carafe à vin révolutionnaire, m’attend pour déjeuner dans un restaurant au bord du lac à midi et demi. Tout va bien, je serai à l’heure. Sauf que… sauf que un éminent reporter-photographe de chez Bettane-Desseauve me fait une proposition, juste indécente vu le timing qui se resserre dangereusement : prendre une coupe de champagne à l’invitation de Clément Fayat, au beau milieu de la pelouse du grand et splendide stade que son entreprise vient de construire. Désolé, Louise mais je ne peux pas résister !
Une navette nous aide à faire sans efforts exagérés les 200 mètres qui nous séparent du nouveau saint des saints bordelais. Alors, se révèlent à mes yeux incrédules les coulisses puis la scène du théâtre des futures exploits des rugbymen de l’Union Bordeaux Bègles et des footbaleurs des Girondins. Je suis immédiatement aimanté par le vert cru, violent, de la pelouse qui contraste avec le blanc et le gris clair, si reposants.
Discours convenus, remerciements courtois, mais moi, pendant ce temps, je suis comme un gosse à Disneyland. C’est vraiment un magnifique stade, au point d’imaginer que même les supporters seront sensibles à cette beauté architecturale et s’y comporteront en gentleman… C’est dire !
Sans doute les premiers effets des flûtes de champagne prestement distribuées par des hôtesses sélectionnées, jolies, à l’uniforme impeccable, girondes quoi !
Mais, comme pour Kisscool®, il y a un deuxième effet décoiffant qui se manifeste chez moi lorsqu’un joueur de l’UBB susnommée me propose de tirer (nooon !!!) une pénalité face aux poteaux ! Je laisse l’instant, immortalisé par le correspondant de guerre œnophile, parler de lui-même. Merci Guy pour ce souvenir impérissable, en tout cas moins périssable que ma cheville après cet exercice plus de mon âge ! L’histoire ne dira pas si le ballon est passé là où il le devait, non, elle ne le dira pas !
Même déguisé en homme-sandwich pour Greta Garbure, la faim commence à me tenailler. Ben tiens, tu m’étonnes : avec tout ça, 13 h 47 sonnent frénétiquement au beffroi ! Ce ne sont pas quelques gougères et trois ou quatre millésimes du château La Dominique qui me feront oublier mon rendez-vous ! Un coup de téléphone penaud et une erreur d’aiguillage plus tard, le restaurant a fermé ses cuisines quand nous arrivons au port… Damned ! Heureusement que le sport est sorti grandi face à ces vaines préoccupations alimentaires. D’autant que dans les allées, les stands de ravitaillement n’ont pas manqué, merci à ceux qui se reconnaîtront.
Encore des instants futiles, des petits bonheurs furtifs, des plaisirs fugaces… La vie, quoi !