Le gin de Camargue BIGOURDAN : évasion et sensualité
L’histoire
Comme vous l’avez peut-être deviné, le patronyme Bigourdan est d’origine béarnaise. Foi de Greta Garbure qui connaît ses classiques puisqu’il existe même une recette de « garbure à la bigourdane » !
Toujours est-il que, malgré son nom, Thomas Bigourdan, jeune distillateur créateur de la Distillerie de Camargue, a élu la Provence — et plus particulièrement la Camargue — comme terre d’adoption. Et, bien qu’ayant travaillé pendant quinze ans dans l’univers des huiles essentielles, des distillateurs et des parfumeurs — ce qui était déjà une bonne approche —, il a souhaité changer de métier et devenir distillateur, avec la furieuse envie de créer un gin rendant hommage à cette Camargue qu’il aime tant.
Bien sûr, cela ne s’est pas fait en un jour et Thomas a d’abord passé quatre ans à Londres où il s’est rapproché de Jamie Baxter, un grand professeur qui l’a initié aux subtilités du métier. Puis, après avoir fait ses gammes, Thomas s’est lancé et a élaboré, seul, SA recette de gin London Dry*. Soumis à Jamie Baxter, master distillateur très à cheval sur la définition de London Dry *, celui-ci a simplement fait ce commentaire après l’avoir goûté : « It’s actuallu lovely.» Bel adoubement, isn’t it ? Le gin Bigourdan était né !
* Les « London Gin » ou « London Dry Gin » sont des « distilled gin » auxquels aucun élément artificiel (arôme ou colorant)) ne peut être ajouté, si ce n’est du sucre, et dans des proportions bien définies (maximum 0,1 g par litre de produit final) et de l’eau.
Restait à trouver un lieu, ce qui fut fait à Arles, à quelques ruelles des arènes, rue Frédéric Mistral (quelle belle adresse !). Avec tout de même une petite séquence émotion car Thomas Bigourdan a cru un instant que la chaudière de l’appareil ne pourrait jamais passer la porte, alors que c’était la seule issue. Tout s’est joué à quelques centimètres près ! Ouf !
Le gin
D’abord, savez-vous que si le mot « gin » est anglais, il dérive lui-même, par ellipse, de l’ancien français genièvre, qui vient du latin Juniperus ? Il entre donc forcément des baies de genièvre dans la composition du gin et même de manière prépondérante. Mais, toute la subtilité vient du choix des autres plantes aromatiques, de leur dosage et de leur assemblage.
Les plantes
Disons-le tout de go, il y a plantes et plantes. Je peste toujours quand je vois des « herbes de Provence » desséchées (quand elles ne sont pas émiettées en flacons) malheureusement vendues dans les épiceries parisiennes (et sûrement ailleurs) et qui n’ont hélas qu’un goût de vieux foin.
Car c’est parce qu’elles poussent dans leur éco-système naturel, intact et préservé dans des conditions souvent difficiles que les plantes issues de la cueillette sauvage sont les plus riches en arômes. C’est la raison pour laquelle Thomas Bigourdan se tourne vers des cueilleurs qui valorisent une cueillette responsable, respectueuse des plantes et des équilibres naturels. Pour créer un gin méditerranéen authentique, il était essentiel pour lui de respecter le biotope local. C’est pourquoi cette cueillette sauvage se fait dans les garrigues de Provence, d’Occitanie et de Corse qui constituent un formidable herbier.
Il dit aussi : « J’avais récupéré des graines de coriandre chez un maraîcher du bord du Rhône pour mes essais, nous avons entrepris d’en replanter pour ma production. Et nous avons aussi planté verveines et sauges chez une fleuriste productrice de fleurs sauvages et de jardin. »
Outre les indispensables baies de genièvre, le gin Bigourdan se compose d’une douzaine d’autres plantes et herbes sauvages comme les thyms, sarriettes et lavandes, fenouil, coriandre, racines d’angélique, citron (pour la fraîcheur), verveines et sauges, et ces belles immortelles jaunes cueillies en Corse. « Arles étant sur la route des épices, c’est chez le maître des épices, le chef Olivier Roellinger, que nous avons sélectionné nos épices et aromates bio complémentaires (cardamome et poivre vert) » dit encore Thomas Bigourdan.
La distillation
Il est distillé en petites séries dans un bel alambic en cuivre.
Il titre 46°.
Ma dégustation
Ce qui m’a plu d’emblée, c’est sa fougue. Pas d’erreur, on est en Camargue !
Le nez séduit par son bouquet d’effluves.
La première gorgée est un choc, un « kick » comme disent les Anglais.
Car la bouche est instantanément voluptueuse, charmeuse, riche de parfums et de goûts qui se bousculent entre papilles, intérieur des joues et voûte palatine. C’est un carrousel de saveurs à la fois subtiles et généreuses qui sont comme une promenade dans la garrigue.
L’attaque est vive, le nez d’une belle fraîcheur, celle de la baie de genièvre sauvage que soulignent le poivre vert et un soupçon d’agrume (zeste de citron).
Le cœur est précis, d’un bel équilibre, d’une belle rectitude, avec des notes herbacées persistantes de verveine, sarriette et sauge. La coriandre se devine à sa note citronnée et sa longueur, la racine d’angélique étoffe le fond et le citron dynamise le tout par sa fraîcheur.
Enfin, l’immortelle, fleur des dunes, et la cardamome apportent la finale ronde, chaude, presque sèche.
Oui, on est bien en Camargue et la balade est à fleur de peau.
Fermez les yeux, tout y est : le sel qui crisse sous les pas au bord des marais salants bordés de salicornes, le sable brûlé par le soleil, les sentiers dans la garrigue à la végétation foisonnante qui griffe les jambes, l’iode apportée par la brise marine et saline, le Mistral qui vous suffoque, la netteté des paysages comme dessinés à l’encre de Chine mais dont le soleil et son écrasante chaleur font bouger les contours qu’on croirait alors mouvants, dans une sorte de petit vertige.
Oui, ce qui me plaît, c’est ce tempérament fougueux étonamment doublé de fluidité.
Comme un bel amant empressé, un gardian au charme et à la rudesse parfaitement conjugués, un séducteur, qui vient vers vous une herbe à la bouche, bien campé et sûr de lui, le regard droit planté dans vos yeux et à la bouche l’esquisse d’un petit sourire, un bel amant qui sait déjà qu’il n’aura qu’à vous cueillir pour déposer sur vos lèvres un baiser délicieusement charnel qui vous laisse un goût de sel et de garrigue sur les lèvres, un baiser qui en appelle un autre… et plus si affinités (son cheval n’est pas loin pour vous enlever).
Des gorgées qui sont comme des caresses sensuelles.
Bon, si en buvant et en fermant les yeux, vous voyez des flamants roses, c’est normal, vous êtes en immersion en Camargue.
En revanche, si jamais vous voyez des éléphants roses, attention… c’est que vous en avez trop bu !
Prix : 37 € la bouteille de 50 cl, en vente notamment sur le site
À boire pur — un enchantement — ou en cocktails.
BIGOURDAN
12, rue Frédéric Mistral
13200 ARLES
Tél. 09 81 42 00 42
Courriel : info@bigourdan.com
Site : www.bigourdan.com