Restaurant SAISONS à Asnières-sur-Seine 92600
Insolite pour moi de dîner dans un restaurant du croissant fertile de l’ouest parisien — comme on parodie métaphoriquement cette banlieue chic de Paris dont le département des Hauts-de-Seine est le fleuron. C’est donc grâce à la tournée parisienne d’un producteur de céréales et de légumineuses du Lot-et-Garonne à qui j’avais commandé des produits que j’ai découvert ce restaurant où il avait également une livraison à faire. Vous voyez, comme d’habitude, je ne vous cache rien.
Le restaurant est petit (20 couverts dont une table d’hôtes de 8), niché dans une rue calme, avec une cuisine vitrée donnant sur la salle. Aucune esbrouffe dans le décor mais on est tout de suite à l’aise, également à cause de l’accueil.
Bon, nous y sommes allés la première semaine de réouverture des restaurants après confinement, il est vrai qu’ipso facto, cela mettait tout le monde de bonne humeur.
Verre de vin blanc en main, nous voici donc installés devant l’ardoise du jour, courte mais alléchante. Rappelons qu’une carte courte est un signe de qualité qui garantit la fraîcheur des produits et leur écoulement au jour le jour : donc, d’emblée un bon point.
Mon compère et moi optons pour le même choix : ce sera maquereau et pigeonneau.
Chers lecteurs, j’en suis désolée pour vous car, subséquemment, vous ne pourrez pas vous faire une opinion sur un éventail de plats plus large mais je vais aussi au restaurant pour contenter ma propre gourmandise. Cela dit, ayant lorgné sur les tables alentour, je peux vous dire que toutes les assiettes que j’ai vu passer faisaient envie.
En entrée, cachés sous un dôme d’herbes fraîches, les filets de maquereau frais en gravlax ont le juste degré de marinade et leur texture souple mais sans mollesse est un bonheur en bouche. Quant au bouillon de bœuf, il est d’une grande subtilité, bien dosé en citronnelle, celle-ci étant présente sans dominer la saveur des autres herbes, ses petits yeux en surface — dus à une excellente huile d’olive — assurant le liant. Une alliance terre-mer très réussie.
Je vous mets aussi la photo du plat après l’avoir un peu déstructuré pour que vous jugiez mieux.
Sur cette entrée rafraîchissante, nous avons continué avec le même vin blanc qu’à l’apéritif : une IGP Collines Rhodaniennes, cuvée « Les vignes d’à côté » du domaine Cuilleron, 100% marsanne dont la légèreté et l’aromatique sur les fleurs blanches (acacia, chèvrefeuille, jasmin) et l’amande, avec une touche légère de litchi et de pêche blanche seyait bien à notre maquereau et à son audacieux traitement.
Pour suivre, les pigeonneaux nous ont également conquis (photo sous le titre), tant par la succulence de leur chair et leur cuisson parfaite — si j’ai bien compris, ils sont d’abord en partie rôtis, puis la finition se fait par un petit coup de vapeur qui leur donne tout le moelleux requis — que par les légumes, avec mention spéciale pour les betteraves, sans doute les meilleures que j’ai eu l’occasion de déguster en chaud. Un plat apparemment simple mais auquel le fond de sauce (préparé par Sophie Fleytoux), d’une belle densité sirupeuse apporte noblesse et harmonie.
Pour les accompagner, nous avons changé de couleur de vin et choisi un costières de Nîmes bio cuvée « Les Terrasses d’Hortense » 2015 du domaine Scamandre (45% se syrah, 35% carignan, 20% grenache), typique de son terroir, avec des arômes d’épices, de vanille et de réglisse au nez et une bouche offrant des saveurs mêlées de fruits rouges et noirs (mûre, myrtille, cassis), comme si on les grappillait dans un panier, et une texture veloutée. Un vin qui donnait au pigeon et à sa sauce un petit supplément presque giboyeux.
Au moment du dessert, à nouveau un choix identique pour mon compère et pour moi : sans hésitation l’assiette de fromages car d’une part, c’est la meilleure saison pour les fromages de chèvre, et d’autre part, depuis le temps que j’entends parler des fromages de Laure Fourgeaud (La ferme bio du Chatain), je ne pouvais rater l’occasion d’enfin les goûter.
La déclinaison de fromages est arrivée accompagnée de quelques noisettes torréfiées, d’un léger filet de la même toujours excellente huile d’olive et d’un peu de ciboulette finement ciselée. Elle nous a immédiatement séduits. Les fromages — à déguster de préférence dans un ordre précis selon la consigne — fondaient en bouche, doux, fleurant le frais, avec un lacté soyeux et des textures tendres et caressantes. Cependant, mon accompagnateur et moi-même avons tous les deux trouvé que terminer par le chèvre fumé — aussi léger le fumé fût-il et quoique cet ordre fût logique — a quelque peu troublé la symphonie qui se jouait douillettement sur nos papilles.
Sans la moindre peur, sur ces fromages d’anthologie, nous étions repassé au blanc, plus précisément un gaillac « Mauzac vert » 2016 du domaine Plageoles, 100% mauzac, plus en accord qu’un rouge avec des fromages caprins. Avec ses notes de pomme (dominantes) mais aussi de tilleul au nez, et du gras et de la fraîcheur — ce n’est pas antinomique — en bouche, ce fut presque fromage et dessert en même temps. Jolie finale sur une amertume douce — ce n’est pas antinomique non plus —, en point d’orgue. Comme nous n’avons bu que des vins « au verre », je n’ai pas fait de photos des bouteilles.
Nous n’avions plus faim pour un dessert. Mais la pavlova aux fraises que nous avons aperçue à la table voisine aurait contenté plus d’un bec sucré.
Ce fut donc un repas particulièrement apprécié que cette échappée vers l’ouest. La patronne, Frédérique Triquet, n’était pas là ce soir-là mais c’est son fils Simon qui était aux fourneaux, assisté par Sophie Fleytoux qui assurait aussi l’accueil et le service. Tout à fait le genre de bonne petite adresse qu’on est content d’avoir dans son quartier car les produits sont bons et sourcés, le travail en cuisine les respectant et les mettant en valeur par un vrai-savoir faire et de belles accordailles, mais sans les fioritures chichiteuses qui altèrent aujourd’hui trop d’assiettes. Bref, une cuisine authentique et pure, régalante à souhait, avec un vrai talent pour les bouillons, les jus et les sauces.
Addition payée
Restaurant Saisons
50, rue du Château
92600 Asnières-sur-Seine
Réservations 09 50 84 93 66
Ouvert :
Mardi, mercredi, Jeudi, Vendredi : midi et soir
Samedi soir
Privatisation sur demande (20/22 couverts)