Les rosés de l’été : enfer ou paradis ?
Vous le savez maintenant, www.gretagarbure.com n’est pas un « blog du vin » !
Nos choix sont clairs depuis le début de cette aventure : nous souhaitons écrire pour des lecteurs qui s’intéressent, de près ou de loin, à ce qu’ils consomment sans pour autant être des passionnés-supporters-sectaires-monomaniaques. Greta Garbure est omnivore et boit des vins de toutes natures et de toutes couleurs. Si nous privilégions toujours les vins sélectionnés et vendus chez des cavistes sérieux (il y en a de nombreux), nous prenons aussi en considération que plus de 80% du commerce des vins se font dans les grandes surfaces (il y en a trop !). Et que les achats de vins rosés ont littéralement explosé, notamment en cette saison estivale et particulièrement caniculaire cette année. Pour autant, nous ne pouvons encourager le triplement de l’absorption moyenne de vin, de pastis et de bière, au prétexte qu’il fait chaud et qu’il faut bien se désaltérer avant, pendant et après les repas ! Sous l’auvent de la caravane de Dupont-Lajoie comme au bord de la piscine à débordement d’une propriété de famille, le phénomène de déshydratation dû à l’alcool est accéléré par les rosés médiocres engloutis pour une pseudo bonne cause : la convivialité du moment, qui semble ne pouvoir se vérifier qu’en étant bourrés et en imposant cet état comme une stricte obligation saisonnière. Le triomphe national du rosé-pamplemousse-piscine en est la parfaite mais consternante illustration. De plus en plus partagé sur nos littoraux, il permet d’accélérer la marche du temps, du 14 juillet au 15 août et, à ses adeptes, d’être ainsi rapidement, concomitamment et doublement cramoisis et cramés à la fois, par les degrés du thermomètre et par ceux du rosé.
[Parfois, je me dis que je ne serais pas loin de pouvoir pactiser avec les gourous totalitaires de l’ANPAA (Association Nationale de Prévention et Alcoologie et Addictologie) s’ils acceptaient de parler de qualité et de bons usages du vin au lieu de souhaiter tout interdire et censurer, avec la constance dans l’effort que permettent les fonds publics et l’absence de contrôle d’efficacité dans leur emploi !]
Cet été sera encore meurtrier pour des millions de bouteilles qui seront nées et mortes pour presque rien. J’ai lu quelque part cette sentence admirable à propos du vin rosé : « … Car à l’inverse des rouges et des blancs, c’est un vin de plaisir qui n’exige aucune culture particulière pour être apprécié ! » Alors là, on est au paradis ! Grâce au rosé, c’est TF1, D8 et Gulli réunies à toute heure ! C’est l’art et la science à la portée du caniche abricot ! C’est la Joconde jugée selon la couleur du papier peint du living-room ! C’est la biture pour tous sans réfléchir ! Enfin ! Ben oui, me voilà en colère pour pas grand chose, mon plat à barbe sur la tête et des éoliennes hideuses à combattre comme autant de moulins chimériques et de bouteilles inutiles.
Mais heureusement, il y a les petits et grands vignerons qui osent faire des rosés qui leur ressemblent, qui font partie de leurs familles de vins blancs et rouges. Des vins qui se sirotent, se dégustent, s’apprécient pour eux-mêmes et non par convention collective. Cette année, j’ai eu le loisir de limiter mes dégustations de rosés à des valeurs que je juge sûres. Je n’ai donc pas subi de mauvaises surprises, mes confirmations m’ont même procuré de grands plaisirs. Et pour aggraver mon cas aux yeux des découvreurs de talents anonymes, je revendique mon goût affirmé pour les rosés de Provence et leurs proches voisins ! Dans la série « chez les grands, tout est grand », il faut bien noter que leurs prix sont à l’avenant, aux alentours d’une vingtaine d’euros. Ah ben oui, quand même ! Mais comme vous venez de louer une bicoque sur les Hauts de Saint-Tropez à 20 000 € la semaine, alors ce n’est pas le moment de chipoter sur les détails qui font la différence entre un bonheur sans nuages et une gueule de bois flotté !
Allez, dans le désordre, régalez-vous avec les jolis flacons des bandols du domaine de la Bégude, du château de Terrebrune et du domaine de Pibarnon, des micro-climats du château Simone et du château de Bellet, des séduisants classiques Sainte-Roseline, Sainte-Marguerite et Roubine, ainsi que le domaine Saint-André-de-Figuière ou les Minuty et Gavoty de toujours, sans oublier les excellents Aumérade, Rimauresq, Léoube, Peyrassol, Miraval (eh oui)… Ce n’est bien sûr qu’une sélection personnelle, donc forcément injuste, arbitraire, incomplète, etc. À vous de faire votre choix en ouvrant l’éventail des prix et des origines, depuis le très correct Roche-Mazet du Pays d’Oc voisin à 2,30 € chez Monsieur Leclerc, jusqu’à l’effarant Garrus du château d’Esclans à 90 € !
Patrick de Mari
PS : L’automne venu, il sera temps de se rappeler que l’AOC Côtes-de-Provence offre des blancs remarquables et de très grands vins rouges comme ceux des trop souvent cachés domaine Richeaume et château Revelette.
mamina
29 juillet 2015 @ 7 h 48 min
J’adore tes coups de gueule… bien sûr qu’il y a de bons rosés et des vignerons qui le font bien même si ce n’est pas la majorité. mais tu sais bien que le rosé, ça va avec tout (maillot, tongs etc..) et puis c’est les vacances, alors, il est interdit de penser! Mais quand même, à 4,50 euros la bouteille environ après avoir payé celui qui a fait les étiquettes et celui qui s’occupe du marketting, je vais boire de l’eau.