« Les jolies filles » et « Les mauvais garçons »
Les jolies filles
Pas besoin de vous expliquer ce qu’est une jolie fille, je pense !
N’est-ce pas messieurs ? Vous qui avez tendance à loucher sur leurs appâts et à trouver tout de suite les mots justes : « Vous habitez chez vos parents ? », « T’as de beaux yeux, tu sais ! », « Vous avez du feu ? » « J’peux vous offrir un verre ? », « J’aimerais être ton parfum pour que rien ne nous sépare… » et j’en passe… des encore plus niaises !
Plus le décolleté est profond et suggestif (même siliconé), plus la chevelure est blonde, plus la mini-jupe est courte, plus les talons sont hauts, plus le bronzage est patiné à coups d’ultraviolets, bref plus « l’emballage » est racoleur et plus la fille est jolie… au dire de certains (j’ai dit certains…) !
Les mauvais garçons
Là non plus, pas d’ambiguïté !
Un mauvais garçon c’est rugueux, ça roule les mécaniques, ça porte un jean, un tee-shirt et un blouson de cuir noir, ça passe pas forcément à la douche tous les jours et surtout, c’est provocateur, ça aime la bagarre et ça circule en bandes.
Ils sont presque gentils d’ailleurs les « mauvais garçons » de notre époque par rapport à ceux à qui ils doivent historiquement leur nom : les brigands de grands chemins, les mercenaires, les lansquenets, les reîtres et autres auteurs de désordres qui ont ponctué les siècles de méfaits en tous genres.
Bon, voilà pour les clichés !
Mais les clichés sont sources de fantasmes et le « mundovino » l’a bien compris — même ceux qui ne s’en réclament surtout pas ! — en adoptant des noms racoleurs ou provocateurs pour leurs vins. Attractifs pour le chaland en tout cas.
Nous y reviendrons d’ailleurs très très bientôt sur www.gretagarbure.com
Ainsi « Les jolies filles » et « Les mauvais garçons » ont-ils inspiré des négociants pour appâter une clientèle plus jeune sur un mode ludique.
« Les jolies filles », Côtes de Provence rosé 2012
Ce qui est avéré : il a une robe pétale de rose… très fille !
Il se compose de 30% grenache, 55% cinsault, 15% syrah.
Il titre 12,5°.
Il coûte 6,90 €.
En vente sur www.vinatis.com, chez les cavistes (notamment à Paris et à Saint-Tropez) et dans les boutiques Aegerter à Beaune.
Ce qu’il promet : le dossier de presse le présente comme un vin fin et élégant, acidulé, avec de la fraîcheur et de la rondeur en finale.
Il est conseillé à l’apéritif et pour accompagner les barbecues, la bouillabaisse — diantre ! —, le couscous et la salade de tomates au basilic.
Ce qu’il donne : Que dire ?
Sinon qu’il est insipide, faible et bien plus acide qu’acidulé.
Voilà, n’en parlons plus.
Les jolies filles
Côtes de Provence rosé 2012
Winenot SARL (à Nuits-Saint-Georges)
contact@winenotparis.com
« Les mauvais garçons », Vins de pays d’Oc
Les mauvais garçons se déplaçant en bande — comme nous l’avons vu plus haut —, cette fois, ce sont 3 vins proposés par Gabriel Meffre, avec sur chaque bouteille ce slogan : « Mais c’est qui cet Émile (ou ce Raoul, ou ce Max) ? Un vin sérieux qui ne se prend pas au sérieux » ! :
• Le blanc : « Tranquille Émile » 2012
100% chardonnay – brut de cuve – bouchage synthétique
12,5°.
Argumentation de vente : « Astuce/bon plan : Soirée entre filles, sushi party, potins mondains (penser à caser les mômes !), accompagnée de ce blanc rond aux notes d’agrumes… Une pause TRANQUILLE ! »
Notre avis : arômes classiques mais aucun caractère, acidité assez forte (plus que vivacité).
• Le rosé : « Cool Raoul » 2012
Syrah-grenache.
12,5°.
Argumentation de vente : « Astuce/bon plan : Repas improvisé et épicé, plat chinois ou indien (penser à passer chez le traiteur !), accompagné de ce rosé expressif et fruité à souhait… Une soirée COOL ! »
Notre avis : robe brillante couleur pelure d’oignon soutenue (ce qui veut dire trop), presque orangé. Assez neutre en bouche avec une très légère sucrosité.
• Le rouge : « Relax Max » 2012
100% merlot du Languedoc – brut de cuve – bouchage synthétique
12,5°.
Argumentation de vente : « Astuce/bon plan : Bonne bouffe entre potes, soirée pizza – karaoké (vérifiez les piles du micro !), accompagnée de ce rouge généreux et fruité… Un moment RELAX ! »
Notre avis : assez vulgaire, à boire bien frais… si on y est obligé !
Les mauvais garçons
GMDF (Gabriel Meffre), Le Village à 84190 Gigondas
Prix de vente conseillé : 4,50 €
Enseignes Carrefour de proximité (City, Huit à huit, Marché +, Shopi), U-tile et U-Express.
www.vins-mauvais-garcons.com
Notre conclusion
Déception donc — un peu attendue tout de même — pour ces vins de négoce qui jouent plus sur l’habillage des bouteilles que sur leurs contenus. Étiquettes qui se veulent humoristiques mais qui restent malgré tout un peu tristounettes.
Dommage car drainer un public jeune vers le vin est une démarche réellement enthousiasmante. Mais il ne suffit pas de les hameçonner en parlant le même langage qu’eux, encore faut-il leur donner à boire des vins qui soient vraiment gourmands et qui leur donnent envie d’en boire à nouveau.
Ce que savent faire des pays comme l’Italie, l’Espagne et l’Australie…
Blandine & Patrick
12 juin 2013 @ 9 h 03 min
En même temps, ce sont des vins de négoce pour lesquels les marges sont calculées d’avance pour un retour sur investissement rapide, en tentant de « surfer » sur une tendance, c’est à dire: on emballe bien et beau, on met sur le marché au bon moment, on raconte une histoire même si elle n’est pas tout à fait vraie… quant au nectar, va savoir!!!
12 juin 2013 @ 20 h 26 min
Nous sommes bien d’accord, Stéphane !
Quand c’est bon, nous le disons.
Mais quand ce n’est pas bon,
nous le disons aussi !
12 juin 2013 @ 21 h 52 min
Nous n’en attendons pas moins de votre part Patrick et Blandine! Continuez…