Le Brillat-Savarin
C’est le cas de le dire :
c’est la crème des fromages !
Effectivement, ce fromage triple-crème
— un fromage double-crème
est un fromage
dont la teneur en matières grasses
est égale ou supérieure à 60 %,
tandis qu’un fromage triple-crème
est un fromage
dont la teneur en matières grasses
est égale ou supérieure à 75 % —
est un péché « bon à mourir »
sans possibilité de sevrage,
pour qui aime la crème.
Emblématique du pays de Bray,
au cœur de la Normandie des bocages,
ce doucereux rallie tous les suffrages.
Il est fabriqué à partir de lait
de vache pasteurisé enrichi…
de crème !
On ne compte pas quand on aime
comme vous l’aurez compris.
Il aurait été créé autour d’une table
à l’initiative d’un aréopage
de fromagers.
À l’époque, il existait déjà un fromage
presque aussi aimable
quoiqu’un peu moins crémé :
un double-crème du nom d’Excelsior,
né lui aussi en pays de Bray
fin XIXème
(en fait la plus ancienne des pâtes molles
double-crème à croûte fleurie).
Mais, bien fols,
dans une sorte de défi,
nos gourmands gourmets
voulaient un fromage avec ENCORE
plus de crème !
Et suffisamment plus gros
pour satisfaire l’appétit féroce
d’une tablée de colosses
aimant les repas conviviaux.
C’est ainsi qu’en 1930,
installé dans le canton de Forges-les-Eaux,
le fabricant de l’Excelsior
— fromage qui existe encore —
mit au point
une pâte molle à croûte fleurie
s’en inspirant, mais enrichie.
Tentative convaincante
que Pierre Androuët baptisa illico
Brillat-Savarin,
un fromage sublime
en hommage au gastronome éponyme.
En forme de disque très épais
de 13 cm de diamètre,
pesant 500 g (le double de son ancêtre),
sa saveur est douce au palais,
légèrement acidulée,
veloutée, évidemment crémée.
Pour tout dire, au lait entier enrichi,
il fleure bon la crème fraîche.
Et un court affinage en cave sèche
— une à deux semaines tout au plus —
donne à sa pâte onctueuse et mûrie
une exquise finesse
et une certaine noblesse,
bref, un goût de fruit défendu.
À peine moisie,
sa croûte est alors fleurie
d’un délicat duvet blanc
qui ajoute au ravissement.
Si l’affinage se prolonge
— une à deux semaines de rallonge —
la croûte rougit
et la pâte prend une saveur grasse marquée
— presque la sensation de coller —
qui convient mieux aux affranchis.
Le Brillat-Savarin est aujourd’hui
un fromage déposé
qu’on peut consommer toute l’année,
pas besoin de changer de crémerie.
Mais comme le disait Jean de La Fontaine,
« Si ce n’est toi, c’est donc ton frère ! »
d’autres fromages similaires
— la bonne aubaine ! —
ont vu le jour partout en France
et lui font çà et là concurrence.
Imitations, contrefaçons…
mais pas la même appellation !
Rien qu’en Normandie,
il a des cousins proches
presque aussi vieux que lui,
mais qui ont raté le coche
question célébrité :
le Parfait, son jumeau mais en plus affiné,
le Suprême,
lui aussi saturé de crème,
et le Magnum
(encore appelé Chateaubriand),
tous parents des précédents
et dont on peut le constater,
le nom évoque toujours le summum !
Mais y a pas de mal à se faire mousser…
D’ailleurs,
comble de gourmandise,
l’hiver il se fourre à la truffe noire
et l’été à la blanche ivoire,
variations exquises
aux nombreux adorateurs !
Sur un plateau : Le Brillat-Savarin | thevoiceo...
19 septembre 2013 @ 7 h 37 min
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Sur un plateau : Le Brillat-Savarin | Brazilian...
19 septembre 2013 @ 19 h 56 min
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