L’adresse la plus secrète de Paris !
Comme vous le savez si vous êtes fidèle lecteur, Patrick étant plus souvent au Pays basque qu’à Paris, j’emmène de temps en temps mon amie comédienne et rockeuse endiablée Brigitte Chamarande — c’est la chanteuse du groupe Rodéo Drive — dans les restaurants que je dois tester. Car il est toujours plus agréable de dîner en bonne compagnie.
Mais cette fois, c’est elle qui m’a fait la surprise de m’inviter à dîner chez l’un de ses amis cuisinier émérite (entre autres nombreux talents que je ne dévoilerai pas sinon celui d’être notamment un guitariste de rock et de blues hors pair). Appelons-le Jean-Michel.
C’était en juillet, il faisait très beau et la petite terrasse en rooftop s’est révélée vraiment épatante pour profiter d’un peu de fraîcheur mais aussi pour jouir d’une vue imprenable (selon l’expression consacrée) sur Paris et son phare : j’ai nommé la Tour Eiffel.
Après avoir pris l’apéritif en devisant joyeusement et en grignotant quelques amuse-bouche faits maison dans un cadre « so cosy », nous voici donc attablées avec notre hôte dans ce petit coin de paradis situé dans l’ouest parisien. Et là ! Et là, je peux bien vous le dire, j’ai été bluffée !
Car pour commencer, notre amphitryon nous a servi une salade composée d’ingrédients judicieusement réunis pour convenir à la fois au temps qu’il faisait et à notre gourmandise : une salade de crevettes à l’avocat et aux tomates cerises, piquetée çà et là de quelques brins de ciboulette. Du déjà vu, me direz-vous ? Eh bien, non, non et non ! Rien à voir avec les cocktails de crevettes qui attendent le chaland dans les frigos de tant de restaurants. Là, c’est du fait minute et la sauce n’est pas véritablement une mayonnaise ni une sauce cocktail (mayonnaise tomatée et relevée d’un trait de cognac), elle est fluide et superbement goûteuse. On y décèle une pointe de moutarde mais juste ce qu’il faut pour émoustiller le palais. Je n’ai pas demandé le secret de la sauce mais je le regrette. En tout cas, je me suis régalée.
Pour suivre, ma copine m’avait alléchée en me disant qu’il y aurait des pâtes au pistou. Ayant vécu cinq années en Italie (même si plus au nord de la Ligurie), c’est un plat que j’apprécie quand il est bien fait. Mais elle m’avait précisé : « Pas le pistou traditionnel ». J’en profite pour informer ceux qui ne le sauraient pas encore que pistou n’est pas synonyme de basilic comme on le croit souvent à tort, même dans la presse. Pistou vient de l’italien « pestare » et ça veut dire « piler au mortier ». C’est seulement le « pesto alla genovese » (pistou génois) qui est à base de basilic. Entre parenthèses, au mois de décembre dernier, j’ai gagné l’épreuve organisée par l’Ambassade d’Italie pour représenter la France au Championnat du monde de pistou en 2018 à Gênes. C’est vous dire si je suis une experte.
Toujours est-il que ce pistou-là était somptueux ! Il m’a fallu goûter et regoûter pour trouver mais j’ai fini par deviner : pistou de menthe et de pistaches. Eh bah mes amis… c’est fabuleux ! Original sans esbrouffe, cohérent, intelligent et diablement gourmand. D’ailleurs, j’en ai repris !
Coté glou-glou, nous avons bu une bouteille de coteaux-d’Aix blanc 2017 du domaine d’Éole qui a sustenté notre soif avec bonheur.
Avec son attaque vive, pure et tendue et sa fraîcheur jusqu’en finale, il s’est harmonieusement marié avec les plats.
Enfin, comme dessert, ce fut une bonne initiative : un melon rafraîchissant au possible accompagné de palets aux amandes. C’est vrai qu’on sert souvent le melon en entrée, qui plus est noyé de porto ou de vin doux ou encore affublé de jambon de Parme, mais le servir en dessert comme le faisaient nos grands-parents est tombé en désuétude. Ce qui est bien dommage car en fin de repas il régénère la bouche sans l’empâter (voire la plomber) comme le font trop de pâtisseries. En tout cas, c’est parfait en période estivale.
Ah ! Au vu des assietttes, vous pensiez qu’on était peut-être au Beau Rivage à La Napoule ? Que nenni, vous avez tout faux. Ici la vaisselle est vintage, chinée dans les brocantes ou au hasard des voyages.
Bon, une fois ce joli repas terminé, repli au « salon » pour un café.
C’est aussi l’heure de prononcer mon verdict. J’ai dégusté ici une cuisine simple mais réalisée avec vérité : vérité des produits, vérité des recettes et vérité de l’interprétation. Avec pour résultat un charme authentique et une gourmandise avérée. C’est une cuisine qui a de l’âme, excusez du peu.
Alors Brigitte, je te dis merci. Merci pour cette jolie découverte dont je ne dévoilerai pas l’adresse. Et pour cause : une petite adresse comme celle-là, il faut la garder pour soi !
Et il est bien sûr évident que Greta Garbure ne peut que laisser ici son rond de serviette !
Bon, vous l’aurez compris, cet article est un clin d’œil à un ami dont j’ai découvert qu’en plus de tous ses autres talents, c’est un véritable maître-saucier !
Invitation d’une amie
Chez Jean-Michel
75016 Paris