Propos éparpillés
La sortie du Guide Michelin se résume facilement en un débat nombriliste qui véhicule tous les ans les mêmes antiennes, les mêmes oukazes et, bien souvent, tout et son contraire. On discute les méthodes employées, ses goûts surannés, ses manques d’audace, ses opinions trop ou pas assez tranchées, la guéguerre, favorisée ou contrariée, entre le groupe « Relais & Châteaux » et celui d’Alain Ducasse « Châteaux & Hôtels Collection », l’importance relative de la qualité et de la tenue des toilettes dans l’appréciation de l’assiette, etc. etc.
« D’abord, c’est pas comme ça qu’il faut faire »… « Et puis ce serait mieux s’il n’existait pas. »… « Ce petit livre rouge exerce une véritable tyrannie »…
Je sens que je vais créer le Guide Mi-Chemin pour ceux qui sont au milieu du gué, ni bons ni mauvais, ceux qui ne valent pas la peine qu’on se batte pour eux, même pas contre eux…
On vit une époque formidable : l’affaire Giboulot met aux prises un vigneron bourguignon biodynamiste, une flavescence dorée sur tranche et une administration très à cheval sur les nuées de cicadelles. À entendre les uns et les autres, il y aurait d’un côté les empoisonneurs avec leurs panoplies de parfaits petits chimistes et de l’autre, les benêts béats qui regardent passer les hirondelles, un brin d’herbe garanti Démeter entre les lèvres. Les apostrophes employées par les deux camps qui s’affrontent sans ménagement témoignent de la rudesse du débat ou plus exactement de son absence ! Chacun s’érige en juge, en avocat de la défense, en procureur d’une république dérisoire. Que de mépris échangé entre initiés de la dernière heure, engagés volontaires dans des combats bien au-dessus de leur condition. Je le sais, je participe parfois à ces joutes consternantes, en apportant mon grain de sel à cette dune de sable pavée de bonnes intentions !
Moi dorénavant, j’attends que les OGM deviennent bios !
La critique du critique Robert Parker : depuis plus de 30 ans on lui reproche d’affirmer son goût personnel qui semble pourtant correspondre assez bien à celui de ses lecteurs si l’on en croit leur nombre. Sa damnation lui est pourtant promise à cause de l’hégémonie de ses jugements iniques (ta mère !). Ce n’est pas un hasard si c’est en France que la détestation des « élites » se manifeste le plus bruyamment à son égard : il est déclaré coupable de son succès et, plus paradoxalement encore, de la faible influence internationale de ses homologues français ! Un sauvage américain qui oblige le reste du monde à obéir à ses diktats (sans doute par la force ?) alors qu’il eut été plus démocratique de laisser tous ces buveurs d’eau et de bière se contenter de n’importe quoi, pourvu que ce fut français ! Enfin, sauf du bordeaux, quand même… parce que… ils vendent trop et trop cher, n’est-ce pas ?
Et puis il y a un livre tout nouveau tout chaud qui dit que les propriétaires bordelais sont trop riches, que ce ne sont plus des paysans et que ça… c’est mal ! On croirait reconnaître la même ambition destructrice qui vient de guider la plume de Lionel Jospin, bien décidé à se payer rien moins que Napoléon 1er ! En personne ! La vérité vraie lui a enfin été révélée comme par miracle, et à lui seul ! Il s’est donc cru obligé de commettre « Le mal napoléonien » ! Saint-Émilion, l’Empire, même motif, même punition ! Et décidément, ce qui est excessif devient vite risible… ou à pleurer !
À l’heure où une commission du Sénat a héroïquement introduit un amendement dans un projet de loi qui énonce que « le vin, produit de la vigne, et les terroirs viticoles font partie du patrimoine culturel, gastronomique et paysager de la France. » Alléluia !
Kyrielles de copier-coller, litanie de reproductions intégrales de la phrase sublime et surtout, du communiqué de presse… et puis… c’est tout ! A-t-on avancé ? En tout cas, on a existé dans les journaux, les blogs, sur Facebook, ce café du commerce moderne.
Contre tout ce qui est pour, pour tout ce qui est contre ! Voilà notre sport national. Pfffff… Tout fout le camp… mais rien ne change… Décidément, c’est toujours pareil !
Si ça continue, il ne manquerait plus qu’on fasse bientôt des plaisanteries désobligeantes sur notre Président de la République…!
Le coin du donneur de leçons |
10 mars 2014 @ 7 h 01 min
[…] tranchées en réaction au billet de Patrick « Propos éparpillés » publié vendredi dernier (http://gretagarbure.com/2014/03/07/le-coin-du-donneur-de-lecons-5/), papier qui souhaitait souligner la vanité des polémiques hargneuses au sujet de quelques […]