La fressure
Savez-vous ce que c’est ?

On nomme « fressure » l’ensemble des gros viscères (foie, cœur, rate et poumons) des animaux de boucherie lorsqu’ils se présentent d’un seul tenant. On cuisine surtout la fressure d’agneau ou de cabri, voire celle de veau, les abats de bœuf étant généralement séparés et vendus individuellement. On utilise aussi la fressure de porc, notamment en charcuterie.
Le mot vient de l’ancien français froissure, du latin populaire frixura qui signifie « poêle à frire », mot descendant de frixare, c’est-à-dire « frire ».
En effet, dans l’Antiquité, on avait coutume de consommer les viscères. D’une part parce qu’on ne laissait rien perdre mais d’autre part, parce qu’on était très friand d’abats et que la fressure était sans doute préparée le plus souvent fricassée à la poêle.

Autrefois chez nous, elle était usuellement cuisinée dans nos campagnes, sans doute par souci d’économie domestique mais aussi parce que bien accommodée, elle peut devenir un plat délicieux.
Comme par exemple la « sauce de pires » — pire étant ici le nom vernaculaire de foie —, spécialité de l’Angoumois, de l’Aunis et de la Saintonge. Il s’agit d’une sorte de ragoût préparé avec le foie (dit foie noir) et les poumons (surnommés foies blancs), le tout coupé en petits cubes et longuement mijoté dans une sauce pouvant contenir du cognac, alcool régional.
Ou comme « la chalcho ol vi ou meleho » en Guyenne (Périgord, Quercy, Rouergue, Bigorre et Bordelais), une fressure mijotée au vin.
Ou encore le « panturon » dans les Landes, fressure d’agneau (après que le cœur, le foie, la rate et les poumons aient été blanchis et taillés en dés) mijotée pendant plusieurs heures dans une fondue d’oignons et de blancs de poireaux avec du vin blanc. On liait la sauce avec le sang, le ris et la cervelle de l’agneau et pour servir, on accompagnait de tranches de pain rôties et frottées à l’ail.
Une époque où l’on savait vivre !
À l’étranger, quelques pays ne la dédaignent pas : en Écosse, on utilise la fressure de porc pour farcir la panse de brebis, le fameux haggis ; en Autriche, les Viennois se régalent d’un ragoût à base de poumon et de cœur de veau. Et en Allemagne et en Europe centrale, elle est également très populaire.
En revanche, en France, elle est tombée en désuétude et ne se trouve pas facilement, surtout parce que le poumon — le mou — est boudé… même par les chats, désormais habitués à des mets plus industriels. C’est à peine si on consomme les abats qui la composent au moment des fêtes de Pâques, période des agneaux de lait entiers.
C’est bien dommage ! Certes, ce sont des recettes qui requièrent du temps et de la patience, mais quelle volupté que ces plats d’antan lorsqu’on les partage avec quelques amis bien choisis.
