C’est la crise mondiale !
J’ai parfois la faiblesse de croire que le monde pourrait être meilleur. J’aimerais bien sûr que les conditions de vie de mes congénères s’améliorent, que le chômage régresse, que les chercheurs trouvent, que la météo soit raisonnable, que le Loto récompense aussi ceux qui n’ont pas joué, que l’Aviron Bayonnais soit champion du Top 14 et Reims de la Ligue 1. Mais tous ces espoirs ne sont que des chimères.
En revanche, je ne voudrais pas laisser passer cette fin de période de vœux sans rêver à des tranches de vie idéales, aux moments de grâce que que seuls nos amis étrangers connaissent : je parle de cet instant béni où, dans un restaurant, le regard du client pourrait se porter sur une carte des vins sans se brouiller d’effroi en glissant sur la colonne de droite.
En effet, il est plus facile d’appâter le chaland avec des prix de marché sur les entrées, les plats et les desserts qui sont regardés en priorité dans les magazines ou à l’entrée des établissements, et déterminent en grande partie son choix. Une fois assis et confronté au prix des bouteilles, le client effaré et affamé peut choisir entre se lever et partir à la recherche d’une autre table moins « ambitieuse » ou bien boire de l’eau. Sinon, il doit envisager avec plus ou moins de sérénité le doublement prévisible de l’addition. Car les coefficients multiplicateurs délirants sont le désolant apanage de notre bonne restauration française. À cet égard, l’Espagne est un véritable paradis. Le Pays Basque sud, que je connais le mieux, recèle de très nombreux restaurants et bars où le vin fait partie intégrante de la proposition commerciale. On y trouve non seulement de grandes tables avec autant de macarons que dans toute l’Aquitaine mais aussi des maisons plus modestes qui respectent le vin au point de posséder des caves à faire pâlir d’envie nombre de nos restaurateurs. De plus, les prix pratiqués sont souvent inférieurs à ceux que l’on trouve chez nos amis cavistes français… Alors cherchons l’erreur et désignons des boucs émissaires ! Des défilés revendicatifs entre Bastille et Nation à Paris, entre la mairie et la place du Foirail, entre la salle polyvalente et le monument de la guerre de 14 ailleurs, unissant au coude à coude des vignerons et des clients en révolte qui brandissent des pancartes et des banderoles réclamant la mort des restaurateurs-assoiffeurs, ça ne manquerait pas d’allure mais on se tromperait encore de cible. Comme souvent en pareilles circonstances. Couper la tête de nos chefs éminents et de nos sympathiques patrons de bistrots ne résoudrait en rien le problème.
Les marchands de primeurs et de salaisons, les poissonniers et les bouchers seraient bien capables de descendre à leur tour dans la rue si l’on multipliait les prix de leurs produits sans plus de modération.
La crise ! C’est la faute à la crise, ma bonne dame ! D’ailleurs, à ces tarifs, ce n’est pas la crise de foie qu’on risque, c’est juste une crise mooondiaaale !
PdM
Cad
24 janvier 2013 @ 21 h 17 min
Je vais te donner un exemple. Il y a qques années, j’avais décrété qu’il faut, lorsqu’on est un restaurateur qui respecte à la fois les vignerons et les clients, proposer une carte des vins avec des coefficients multiplicateurs raisonnables (moins de X 2.5 du HT au TTC, soit par exemple pour un col de 75 cl acheté 5 Euros HT, le vendre TTC sur table 12.50 Euros). Mal m’en a pris, on ne vendait plus de vin. Je me suis posé plein de questions. Et puis, la lumière a jailli : en fait quand un vin n’est « pas assez cher », dans l’esprit du client c’est qu’il n’est pas bon. Alors… comment faut-il faire? (j’ai déjà une petite idée )