Anicia – Paris
Anicia
bistrot nature
par François Gagnaire
Paris 6e
Dissipons tout de suite un éventuel malentendu : il n’y a aucun lien de parenté entre François Gagnaire et son homonyme Pierre, quand bien même ils sont tous deux originaires de la région Auvergne-RhôneAlpes, Haute-Loire et Puy-de-Dôme pour François et Loire pour Pierre.
J’ai connu ce lieu il y a bien longtemps quand il s’appelait « Le Rond de Serviette ». Il a changé plusieurs fois de mains et depuis six mois, François Gagnaire y a pris ses marques, préférant laisser son restaurant étoilé (1*) du Puy-en-Velay pour s’installer à Paris et faire ce qu’il a envie de faire : une cuisine nature qui mette majoritairement en exergue les beaux produits de son terroir. Le décor fait d’ailleurs la part belle aux livres sur la région et en face du comptoir, il y a un petit corner épicerie où l’on peut acheter des lentilles, de la verveine, etc.
Mais plongeons-nous dans la carte en grignotant quelques tranches de radis mis en scène de manière ludique sur un étendoir à linge miniature. Plus compliqué que rigolo à mon goût.
Pour moi, ce sera sans hésitation le « gaspacho de lentilles vertes du Puy, coquillages et condiments » parsemé de truffe d’été bien que l’appellation « gaspacho » soit totalement impropre car elle correspond à une recette spécifique et n’est aucunement synonyme de soupe froide. Ah, ces emprunts fantaisistes qui entraînent une confusion généralisée ! Mais je ne me plains pas, cette « soupe » est absolument délicieuse et, pour insolite qu’elle soit, l’alliance lentilles-coquillages (des coques) est tout simplement remarquable. La truffe en est presque superfétatoire.
Mon convive a choisi quant à lui le « caviar d’aubergine « brûlé », truite de Vourzac, grenaille de Noirmoutier et kasha russe » qui le déçoit un peu. En fait, il a longuement hésité entre deux plats et regrette de ne pas avoir pris la « tarte fine feuilletée tomate et gaperon ». Néanmoins, l’assiette fonctionne bien et le gruau de sarrasin (kasha) apporte une petite note impertinente qui se marie bien avec le fumé de la truite et le brûlé de l’aubergine.
À l’apéritif et sur ces entrées, nous avons bu un chardonnay Grande Courtade 2015, ma foi très plaisant.
Pour le plat de résistance, nous hésitons entre « l’agneau de Haute-Loire rôti et confit, petits confits farcis gratinés à la fourme de ValcivièreS » (il manque un S final sur la carte !) et le veau « pièce de Vedelou cuit lentement en sautoir, macaronis et haricots beurre, pâte d’échalote ». L’agneau est un agneau noir du Velay et le veau de Vedelou un veau de lait auvergnat Label rouge.
Allez, ce sera un de chaque dont l’agneau pour moi. Les deux plats sont goûteux à souhait avec des viandes cuites juste comme il faut. Mon agneau et mes petits farcis sont un pur bonheur. Plus classique, la garniture du veau lui va cependant très bien. Je ne regrette pas mon choix et me régale !
Une petite pause fromage est bienvenue avant le dessert et pour ma part, je ne résiste jamais à un saint-nectaire fermier car c’est sans doute mon fromage préféré. Mon acolyte préfère goûter la « tomme aux artisous de la ferme Brancouny ». La tomme est un fromage auvergnat fermier au lait cru de vache dont la croûte est « sculptée » par l’artisou qui n’est autre qu’un acarien. C’est lui qui le façonne et lui donne ce goût particulier, artisou étant le nom auvergnat du ciron que l’on retrouve sur la mimolette. Fouchtra ! Dommage, il fait très chaud et ce fromage en a un peu pâti. En revanche, mon saint-nectaire est au top.
Sur les viandes, nous avons bu un « VIP » (Very Impressionnant Pinot) 2012 produit en Auvergne. Un vin nature léger et fruité que, une fois n’est pas coutume, nous avons gardé jusqu’à la fin du repas.
Au dessert, mon accompagnateur a envie de fraîcheur et opte pour une sobre assiette de fruits rouges accompagnée d’une quenelle de sorbet myrtilles et de « thé de carcadé » (hibiscus).
Moi, je préfère un dessert de grand-mère comme je les aime : une « poêlée de cerises et sa brioche perdue, crème glacée au lait d’amande » qui, de fait, me fait retomber en enfance.
Mais pris de remords, mon acolyte regrette de ne pas avoir goûté la spécialité emblématique de la carte des desserts : les « meules de gaufrettes au foin de Mézenc, paille de kadaïf, caramel fleur de sel » et nous convenons de nous en partager une. Ce dessert esthétiquement très réussi est créatif mais je le goûte du bout des lèvres car je préfère rester sur ma brioche perdue.
Les mignardises s’annoncent. Prendrons-nous un café ?
Et bien non, nous préférons clore ce repas par une tisane de foin du Mézenc préparée avec l’herbe riche en flore rare (30 espèces environ) et séchée du plateau du Mézenc, celle-là même qui nourrit le bœuf fin gras du Mézenc qui est une viande saisonnière (printanière) exceptionnelle bénéficiant d’une AOC-AOP. Et c’est effectivement une ponctuation finale aussi séduisante que digestive !
Avant de nous retirer, nous bavardons un moment avec François Gagnaire qui nous explique un peu sa démarche. Il se sentait prisonnier dans le cadre rigide d’un long partenariat et a eu envie d’être plus libre dans ce bistrot, « son » bistrot « nature »… même s’il n’est pas à l’abri d’une étoile à Paris !
Mais une question me démange : » Chef, pourquoi le nom d’Anicia ? »
Pour trois raisons me répond-il :
– C’est le nom de l’ancienne ville romaine du Puy ;
– C’est également le nom de la variété communément appelée « lentille verte du Puy » ;
– Enfin, c’est un nom à connotation féminine, comme un prénom, et je trouvais ça à la fois doux et emblématique des produits que je défends. »
C’est en tout cas une adresse à suivre où des produits de terroir d’excellente qualité sont travaillés avec beaucoup de créativité, de sensibilité et de sincérité. C’est certain, nous reviendrons !
Invitation d’une attachée de presse.
Blandine Vié
Anicia par François Gagnaire
97, rue du Cherche-Midi
75006 Paris
Tél : 01 43 35 41 50
M° Duroc ou Vaneau
Site : www.aniciabistrot.com
Forza Dédé
12 septembre 2016 @ 16 h 01 min
Alors, Valsivières ça prend un S, mais Puy-en-Velais, ça ça vous choque pas …. Rendez nous notre Y ou vous serez privé de lentilles ! Allez, je vais être pénible jusqu’au bout : le é de Mezenc se prononce mais ne s’écrit pas ( « Mézin » que ça ce dit en bougnat !)
Je garde des souvenirs impérissables de son étoilé et il me tarde de passer le voir « à la capitale » 😉
gretagarbure
13 septembre 2016 @ 9 h 22 min
Comme quoi les meilleurs ont aussi des distractions ! 😉
D’ailleurs, vérification faite, Valcivières prend effectivement un S final – vous remarquerez au passage qu’il y a les 2 orthographes sur la carte et pourtant le chef est natif du cru ! – mais surtout un C et non un S comme vous l’indiquez ! 😉
Mais vous avez raison, pour Le Puy-en-Velay, nous sommes impardonnables et battons notre coulpe !
Merci de votre vigilance, nous aimons aussi apprendre des choses de nos lecteurs.
gretagarbure
14 septembre 2016 @ 21 h 18 min
Et si vous aviez lu l’article comme il faut, vous auriez vous que nous avions signalé l’erreur pour Valcivières, en mettant le S final en majuscule !