Plaidoyer pour la viande de cheval
Au cœur d’une actualité qui aurait pu la diaboliser, la viande de cheval connaît au contraire un regain d’intérêt de la part des consommateurs. Conséquence inattendue car pour la plupart d’entre eux, elle est assez méconnue.
D’une part, pour certains c’est une viande taboue. Soit pour des raisons culturelles, soit pour des raisons de sensibilité personnelle. Ce qui est d’ailleurs tout à fait respectable.
D’autre part, elle n’est pas si facile que ça à trouver puisqu’il n’y a plus que 700 boucheries chevalines en France — deux fois moins qu’il y a 10 ans — et que 2% de la population seulement en consomme régulièrement. Désaffection qui n’a cessé de progresser depuis les années cinquante-soixante, époque où elle était très populaire.
Il est vrai qu’avec une Maman originaire du Nord, j’ai quant à moi mangé du cheval toute mon enfance : steak tartare le samedi midi environ une fois par mois — et j’adorais ça ! — et rôti de cheval de temps à autre, que j’aimais moins que le rôti de bœuf. Mais malgré tout, j’ai perdu l’habitude d’en consommer à cause de la difficulté à m’en procurer (n’ayant pas de boucherie chevaline à proximité).
Il serait donc tout à fait épatant que « l’affaire du cheval dans les lasagnes » remette cette viande… en selle !
Car elle le mérite amplement ! Non seulement elle est goûteuse et tendre, mais elle est également très saine.
Historiquement, on mange d’ailleurs de la viande chevaline depuis des millénaires comme en attestent de nombreuses peintures rupestres de l’ère préhistorique. Car le cheval fut d’abord gibier avant de devenir animal domestique.
En fait, c’est la Rome chrétienne du VIIIème siècle qui a imposé le tabou de l’hippophagie en jetant l’anathème sur les peuples païens du Nord qui consommaient de la viande chevaline… et qu’il s’agissait de convertir. Les Rois de France ne l’ont guère appréciée non plus. Et c’est Napoléon III qui a autorisé officiellement sa vente en 1866. La première boucherie a ouvert à Paris, remportant aussitôt un vif succès.
Il faut encore savoir qu’il existe en France 37 races de chevaux différentes et que ne plus consommer de viande chevaline reviendrait à voir disparaître l’élevage de chevaux de trait qui a été sauvegardé grâce aux débouchés générés par la boucherie.
En effet, plus de 80% des 16 000 animaux qui naissent chaque année en France sont destinés à la consommation humaine. Seuls 2% sont élevés à des fins de loisirs. Et c’est grâce au développement de cette filière que les 9 races de chevaux de trait considérées comme menacées d’extinction par l’Union Européenne sont conservées.
Les chevaux adultes peuvent également être consommés si leurs documents d’identification assurent qu’ils n’ont pas eu de traitement médicamenteux rendant la viande impropre à la consommation (et qu’aucun de leurs précédents propriétaires ne s’est opposé à leur introduction dans la filière bouchère).
À ce jour, un peu moins de 30 000 tonnes de viande chevaline sont consommées en France. Les deux principales régions de consommation sont le Nord-Pas-de-Calais et la région parisienne.
D’un point de vue nutritionnel, la viande chevaline possède de nombreux atouts :
– elle contient très peu de matières grasses,
– c’est une très bonne source de fer,
– elle est riche en protéines : un peu plus de 20 g pour 100 g,
– elle contient des vitamines du groupe B : B3, B6, B12.
Culinairement, elle est savoureuse et particulièrement tendre et facile à mastiquer, ce qui est dû à la fois à la faible teneur des muscles en collagène et au taux de glucose plus élevé que dans le bœuf, qui donne aussi un goût très légèrement sucré.
Bref, c’est une viande d’une couleur rouge très marquée (à cause de la présence de fer), soyeuse et fondante avec beaucoup de jutosité.
Le steak tartare se fait traditionnellement avec de la viande chevaline et c’est d’ailleurs à cause de cette tendreté qu’on hachait plutôt sa viande au couteau. Transposer le hachage au couteau pour du bœuf n’est donc pas aussi orthodoxe que les puristes voudraient nous le faire croire.
La viande chevaline se consomme fraîche et comporte des morceaux nobles à consommer cru (tartare, carpaccio), à rôtir ou à poêler, ainsi que des bas-morceaux à braiser. Ses abats sont également excellents. Enfin, on fabrique aussi de la charcuterie de cheval.
Avec l’Académie de la Viande, nous avons fait très récemment un repas « tout cheval » au restaurant « Taxi Jaune » (13 rue Chapon, Paris 3ème, tél : 01 42 76 00 40) qui s’en est fait une spécialité. Un vrai régal !
Preuves gourmandes en images à l’appui :
BV
Plaidoyer pour la viande de cheval | Food & chefs | Scoop.it
22 mars 2013 @ 15 h 28 min
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