LE LIÈVRE
Qu’il ait été levé « à la pointe du fusil » après avoir été surpris au gîte, blotti au creux d’un sillon où les ors bruns et les rousseurs de l’automne le camouflaient… ou qu’il ait été débusqué à l’étal d’un boucher-volailler, superbement allongé dans sa fourrure rouquine, l’émotion est la même quand sa majesté longues-oreilles arrive sur la table, tant il est vrai que le lièvre symbolise par excellence le côté mythique du gibier !
Il faut dire que c’est l’un des rares aliments qui fut présent à la fois chez les aristocrates — du temps où la chasse était leur privilège — et sur les tables paysannes — grâce au braconnage — induisant d’une part des recettes d’un classicisme sophistiqué, souvent somptueuses, et d’autre part des tourtes, ragoûts et rôtis plus rustiques, comme en témoignent de nombreuses recettes régionales !
Bouquin ou capucin, un rouquin accommodant
Si la chair du lapin de chou nous paraît parfois un peu fade, celle du lapin de garenne a une saveur plus fine, plus délicate, due aux herbes dont il se nourrit dans les landes et les garrigues. Quant au lièvre de plaine, sa silhouette est plus élégante quoique plus robuste (il peut peser jusqu’à 4 kg), à cause de ses longues oreilles et de ses membres plus fins, notamment ses pattes arrière, beaucoup plus développées que ses pattes avant pour lui permettre une course rapide. Son pelage roux dissimule une chair plus sombre, de texture plus dense et de saveur plus prononcée.
Les jeunes lièvres ou levrauts se trouvent bien des cuissons courtes, des marinades légères et des apprêts simples, tandis que les adultes — bouquins ou hases — sont parfaits entre 8 et 12 mois (ils sont alors conseillers ou trois-quarts) quand leur chair est « mûre » à point et s’accommode de marinades plus longues, de sauces plus lourdes, et de cuissons plus douces. Mais râbles et cuisses (détaillés ou non) gagnent parfois à être traités à part.
Quant aux gros lièvres dont la robe fonce avec l’âge et devient brune comme celle des capucins — d’où leur surnom — ils demandent à être longuement marinés et mijotés ou, mieux encore, à devenir terrines et pâtés !
Une palette de recettes
Si vous n’osez pas préparer d’emblée un « lièvre à la royale », ne soyez pas frileux pour autant car ce gibier se prête véritablement à toutes les audaces, même si gibelottes traditionnelles, civets et autres poivrades raviront bien évidemment les gourmets de tout poil !
Ainsi garennes et levrauts se marieront particulièrement bien avec les herbes aromatiques, la moutarde, les échalotes, les lardons, les champignons de Paris ou les girolles, les pruneaux, les abricots secs, les choux, les olives, les filets d’anchois, les câpres, les poivrons, les tomates, la tapenade et le pistou.
Les lièvres d’un bon poids préfèreront les sauces riches, à base de fumet de gibier, de vin rouge, d’eaux-de-vie, de sang et de crème, les croûtons frits au beurre, les champignons des bois, les épices puissantes, les oignons, le lard, la moutarde à l’ancienne, le vinaigre qui attendrit les chairs, les fruits acidulés (pommes ou baies rouges), les châtaignes, les fruits secs (raisins, pignons, amandes), le zeste d’orange, voire même le chocolat !
Car en cuisine, aucun doute : il est permis de courir plusieurs lièvres à la fois !
Savoir-faire |
25 novembre 2014 @ 7 h 01 min
[…] vous avons déjà tout raconté sur le lièvre ici : http://gretagarbure.com/2014/10/09/reconnaissance-du-ventre-45/ Il serait donc temps de passer aux travaux pratiques […]