« IODÉ », le restaurant de Sophie Reigner à Vannes : une cuisine d’instinct pleine de bon sens !
Petite escapade à Vannes dans le Morbihan (qui signifie littéralement « petite mer ») afin de recharger nos poumons en iode mais aussi… nos papilles !
Je vais très vite vous dire tout le bien que je pense de cette table mais positionnons tout de suite le décor, à la fois sobre et élégant, de très bon goût, tous les objets y compris la vaisselle ayant été choisis par Sophie Reigner ou même spécialement fabriqués pour elle afin qu’ils correspondent à son univers. Il faut toujours assortir le cadre au tableau sinon, il y a quelque chose qui cloche.
Ici, tout respire l’océan : le décor, les couleurs, les produits. L’Atlantique motive même l’équipe.
Mais passons à table !
Dégustons d’abord quelques mises en bouche qui se savourent d’abord avec les yeux et nous mettent tout de suite dans le (grand) bain.
Il s’agit d’une raviole à la crème d’andouille surmontée d’un peu de confit d’échalote et de cresson alénois, accompagnée d’une « perle d’huître givrée ». La raviole est succulente et la bille d’huître – des huîtres de la maison Jégat à Arradon élevées traditionnellement, à l’ancienne, c’est-à-dire nées et élevées en pleine mer – explose littéralement en bouche. C’est subtil et le contraste terre-mer (andouille-huître) est une ode au terroir breton, comme si ces deux expressions que l’on pourrait croire opposées jonglaient entre elles, se complétant plutôt que s’affrontant.
Nous a été proposé ensuite un « Velouté de chou-fleur aux aiguilles de pin fumées avec quelques moules marinière et des œufs de brochet », d’une très grande délicatesse. Une très belle recette anoblissant ce légume archi-breton qui mérite bien d’autres atours que les recettes auxquelles on le cantonne toujours. Cendrillon est tout de même plus belle quand elle met une robe de bal.
Ces petites mises en bouche augurent bien du repas qui va suivre, surtout caressées par les bulles toniques de la Méthode traditionnelle « La Dilettante » de Catherine et Pierre Breton.
Comme entrée, j’ai choisi un « Émietté de tourteau, sobacha, glace de bisque, écume de verveine et tuile de laitue de mer » et l’attachée de presse qui m’accompagne a pris quant à elle un « Champignon, couteaux de la côte, thé noir pu-er, jus réduit de champignons, pickles de girolles » pour que je puisse me faire une idée de plus de plats. Pour plus de précisions, le sobacha est du sarrasin torréfié et le pu-er un thé noir. Les deux apportent une petite touche de goût supplémentaire mais aussi leurs vertus digestives. Deux plats de toute beauté et de toute bonté. J’adore le tourteau – qui a ici l’avantage d’être déjà décortiqué – mais tous ses compagnons d’assiette fortifient son côté marin tout en réveillant ce « dormeur » avec (im)pertinence. Réussite également pour le champignon que les pickles viennent émoustiller. Et vous aurez remarqué sans doute que le sarrasin, céréale bretonne par excellence se glisse çà et là pour apporter son cachet terrien.
Avec un verre de très très bon Muscadet Sèvre & Maine Granite 2020 du domaine de l’Écu pour moi, étonnamment rond, et un verre de Quincy Les Folles Vieilles Vignes 2020 du Domaine des Ballons d’Or pour mon accompagnatrice, inutile de vous dire que tout a parfaitement glissé.
On pourrait croire que nous allons en rester là, mais non ! Voilà seulement les plats de résistance : un « Pigeon en deux cuissons » pour moi, et pour ma comparse un « Bar de petits bateaux, pieds de cochons, courges, nuage de rouille au lait ribot ». Mon pigeon est accompagné d’une garniture de petits artichauts et d’un jus de pigeon à la sardine, ce qui peut surprendre au premier abord mais se révèle très judicieux, la sardine jouant ici le rôle d’un condiment opportun qui fouette le plat comme une lame de pleine mer, cette note saline en fortifiant la structure. Une expérience que je ne regrette pas d’avoir faite.
Et toujours ce duo — qui n’est en aucun cas une dualité – « terre-mer » avec cet autre légume emblématique de la Bretagne qu’est l’artichaut, Et le filet du pigeon est cuit très exactement comme il se doit, c’est-à-dire rosé.
Véritable œuvre d’art, le bar de ma commensale a quelque chose d’un vitrail avec ce pied de cochon traité magnifiquement qui apporte un peu de gras au plat. Je regrette presque de ne pas l’avoir choisi.
Pour le glou-glou, nous avons goûté deux rouges : un menetou-salon 2019 Remmootere, et un Irancy 2018 de chez David Renaud, tous les deux bonne pioche.
Bon, tout va bien. Nous commençons à être euphoriques, un petit dessert rafraîchissant s’impose. Ce sera une « Poire rafraîchie d’un poiré au gingembre » qui va clore ce repas d’une jolie ponctuation.
Nous avons encore bu un verre de cidre de sarrasin Kystin tellement bon que je suis allée en acheter avant de quitter Vannes.
Que dire d’autre sinon merci à Sophie Reigner pour ce fabuleux repas. Je n’ai qu’une envie : revenir goûter d’autres plats.
La cuisine de Sophie Reigner est loin d’être farfelue. Elle est au contraire très réfléchie dans ses choix à la fois ludiques mais pourtant tellement logiques. Cela tisse des rapports si harmonieux entre les ingrédients que j’ai envie de plagier le poème Correspondances de Baudelaire et de dire que c’est une cuisine où « les parfums, les couleurs et les saveurs se répondent » avec intelligence et subtilité. La mer et le terroir dialoguent dans l’assiette avec générosité et bon sens. Et ce dialogue « Ar-mor/Ar-goat » – quel beau couple ! – est bien le plus bel hommage fait aux produits identitaires de cette terre bordée d’eau, produits qui ne s’opposent pas mais au contraire se conjuguent. Bravo donc à Sophie Reigner pour son inventivité si bien raisonnée.
Encore une chose.
Greta Garbure ne roule pas pour le Guide Rouge mais Bibedum ferait bien de venir traîner ses bottes en ce lieu et d’y laisser tomber une ou deux étoiles.
J’ajouterais aussi une mention spéciale pour l’accueil, la gentillesse du personnel et les jolies propositions du sommelier.
À ne manquer sous aucun prétexte, donc.
D’ailleurs Greta Garbure laisse ici son rond de de serviette, ce qui est une promesse de revenir un jour.
Menu « galet » entrée, plat dessert : 29 €
Entrée/plat ou Plat/dessert : 24 €
Menu « Galet & Boissons (café, 1 verre de vin) : 36 €
Menu des Petits marins d’eau douce : 17 ou 20 €
Menu « Iodé » (6 plats) 82 €
Menu « iodé » et Accord Mets Vins & Cidres (6 verres de vins et cidre de 10 cl) + 40 €
Menu « Dunes » à 44 €
Menu « Dunes » & accord mets/vins + 28 €
Menu « Embruns » à 61 €
Menu « Embruns » & accord mets/vins + 34 €
Invitation d’une attachée de presse
IODÉ Restaurant
9, rue Aristide Briand
56000 Vannes
Tél. 02 97 47 76 14
Site : www.restaurant-iode-vannes.com