AG – Paris
AG
Bistronomie
Paris 6e
Patrick n’arrivant à Paris que quelques jours plus tard, j’ai demandé à un ami (et confrère) de le remplacer pour m’accompagner goûter la cuisine de AG, un restaurant ouvert depuis moins d’un an qui a succédé à l’Alycastre, en plein Saint-Germain-des-Prés. AG comme le nom du chef : Alan Al Geaam. J’ose le dire, je ne le connaissais pas du tout, même de nom. Eh bien, c’est une bonne surprise !
L’endroit est petit mais aménagé de manière conviviale : un ancien bistrot avec son comptoir relooké façon design dans des tons dominants de gris anthracite et de noir. Sobre.
Nous nous installons et, sur la proposition de Laurent — son nom à consonance polonaise paraissant imprononçable, nous nous contenterons de son prénom —, charmant et attentif responsable de la salle, nous buvons un verre de reuilly 2014 de chez Henri Beurdin, accompagné de petits sablés au parmesan et à l’encre de seiche. Ça s’annonce bien !
Une fois notre choix fait qui panache la carte et l’ardoise du jour, et en attendant les derniers préparatifs à nos plats, nous est servi en amuse-bouche un croustillant de tome de Savoie sur un gazpacho de concombre et melon avec une touche de ciboulette auquel nous ne trouvons rien d’ébouriffant car le croustillant ne croustille pas assez. Bon, attendons !
Mais nos entrées (16 € chaque) arrivent : un bar de ligne en tartare et une terrine terre et rivière pour moi qui adore l’anguille ! La présentation façon jardinet fleuri m’agace un peu (c’est un euphémisme !). D’autant qu’elle masque un très joli travail ! Le tartare est de facture classique avec du combava, de l’avocat et des feuilles d’huître, très bon mais peut-être un peu trop acidulé pour mon goût. En revanche, la terrine, qui conjugue jarret de veau, anguille fumée et foie gras est absolument somptueuse. Et quel dommage de ne pas la voir d’emblée alors qu’elle est bien plus attractive visuellement que ces fleurettes qu’on voit partout ! Le croquant des radis et des petits bouquets de chou-fleur ainsi que l’aïoli qui l’accompagnent l’émoustillent juste ce qu’il faut : un régal !
Sur ces entrées, nous avions repris un verre du très agréable et aromatique reuilly, tout en fraîcheur. Pour les plats, nous optons pour une bouteille de vin de France domaine Rivaton 2011 (38 €), un assemblage de vieilles vignes de carignan (70%), de grenache (15%) et de syrah (15%). J‘ai toujours eu un faible pour ces terroirs de schistes et je ne regrette pas d’avoir convaincu mon acolyte de ce choix car nous buvons du joliment gourmand avec des arômes très présents mais tout en légèreté. Mais attention : il est identifié sur la carte comme un « côtes-du-Roussillon… ce qu’il n’est pas puisque depuis 2008 le vigneron ne présente plus ses vins à l’agrément de ses aimables confrères !
Mais il est temps de passer aux plats de résistance : « noix de ris et joue de veau, déclinaison de carottes, jus réduit » (28 €) pioché sur la carte et « Poitrine de cochon, tomate, pommes de terre mitraille (comprenez grenaille), jus réduit » (24 €) sur l’ardoise.
Là, on est dans le franchement goûtu ! Les viandes sont d’une belle qualité, excellemment travaillées, les cuissons parfaitement maîtrisées et tout est harmonieux dans le contraste des saveurs, notamment en ce qui concerne les ris de veau, plus sophistiqués et accompagnées d’une petite purée de carottes. Mais pourquoi encore des fleurs ? Certes, c’est esthétique mais vivement la fin de ces Floralies qui viennent pervertir même des plats de terroir.
Comme il faut une fin à tout, regardons la carte des desserts. Une fois n’est pas coutume, mon commensal — aussi gourmand de desserts que Patrick —, choisit pour une fois l’assiette de fromages (14 €) de la maison Sanders. Je penche quant à moi pour les « abricots/romarin/pistache » (12 €). Mais comment se fait-il que surgisse inopinément une assiette « yuzu, meringue, sablé, sorbet » (10 €) ? Ah ? C’était pour faire passer le fromage ! D’accord…
Des desserts simples — et eux aussi fleuris ! — parfaitement en accord avec la chaleur puisqu’on est fin juillet.
Sans oublier quelques mignardises tendance avec le café : ah, le retour en force de la guimauve !
Que dire encore ?
Puisque ce bistrot met en exergue « bistronomie et vins de propriété », lorgnons la carte des vins. Elle comporte quelques lacunes et bizarreries. Par exemple, la carte des bordeaux est un peu faiblarde : peut mieux faire car il y a beaucoup de seconds vins. Mais il y a beaucoup de choix judicieux en Bourgogne, en Beaujolais et en vallée du Rhône. Et en dehors du hiatus signalé plus haut à propos du Gribouille, il y a quelques fautes d’orthographe qu’on aimerait voir vite corrigées : fiefs vendéens au singulier (bis), monbazillac avec un T (ter) —un classique ! —, côtes Rotie… Surtout, le prix de certains verres de vin (10 €) étonne quand on voit que la bouteille entière est à 32 € !
Néanmoins — oui, oui, néanmoins ! — malgré ces quelques réserves, si j’habitais dans le quartier, je ferais bien d’AG mon QG ! Mais Alan, sans les fleurettes, hein ?
D’ailleurs, ce sont toutes ces petites fioritures superfétatoires qui m’empêchent objectivement de laisser ici le rond de serviette de Greta Garbure. Parce que dans les restaurants que nous aimons — surtout quand il s’agit de bistronomie censée faire la part belle aux plats canailles et autres mets qui ne sont pas pour les fillettes — on ne vient pas pour manger des assiettes pour amoureux transis à la Peynet. On vient pour manger du solide. Là le solide y est, délicieusement bon, alors dommage de le cacher sous les plates-bandes ! Qu’on se le dise !
Menus du déjeuner à prix raisonnables pour le quartier.
Invitation d’une attachée de presse
Blandine Vié
AG
2, rue Clément
75006 Paris
Ouvert du lundi au samedi, au déjeuner et au dîner.
Tél : 01 43 25 77 66
Site : www.ag-restaurant.fr