Pouding ou pudding ?
Vous avez dit boudin ?
Un pouding désigne le plus souvent un dessert mais il peut aussi y avoir des poudings salés.
Le plus connu est le « plum pudding » (pudding aux raisins secs) qui s’élabore aux alentours de début décembre, qui réclame une préparation longue et méticuleuse, et que l’on sert traditionnellement flambé à Noël en Grande-Bretagne.
On croit généralement que nous avons piqué le mot pudding (déjà employé au XVIIe siècle) aux Anglais pour le transformer en « pouding ».
Eh bah, c’est vrai !
Vrai mais paradoxal !
Car les Anglais ont quant à eux formé le mot pudding à partir du mot français… boudin (provenant lui-même du mot latin « botellus » signifiant « petite saucisse ») !
Comme quoi, les mots peuvent être des boomerangs !
Mais pourquoi et quel rapport avec le boudin, me direz-vous ?
Cette allusion est due au fait qu’à l’origine, le pudding est un amalgame (mie de pain, moelle de bœuf, graisse de rognon, farine, œufs, raisins secs, eau-de-vie, etc.) cuit dans un estomac ou un boyau comme le boudin et pouvant, comme lui, se conserver un certain temps.
Par la suite le pudding fut cuit dans un sac de toile ou dans un linge.
En Italie, le mot « budino » a également la même étymologie. Il désigne lui aussi le pouding mais plus généralement toutes sortes de desserts en forme de boudins, donc préparés dans un moule à pudding ou à savarin (couronne).
En France le pouding de pain rassis — nous donnerons un jour la recette dans notre rubrique « Desserts de grand-mère » — est à rapprocher du pudding anglais mais certaines charlottes (au pain) et les diplomates sont à ranger aussi dans la catégorie des poudings.
Mais encore ?
Charlotte ou diplomate ?
En cuisine classique, on désigne sous le nom de charlotte deux entremets qui se ressemblent, mais cependant différents dans leur conception :
– la charlotte dite russe, qui se fait avec des biscuits trempés et de la crème à bavarois (crème anglaise “collée” à la gélatine), et qui se sert froide ; elle aurait été inventée par Carême qui l’avait d’ailleurs baptisée charlotte parisienne !
– la charlotte dite à l’ancienne, généralement aux fruits, qui se monte avec des tranches de pain beurrées, que l’on garnit d’une compote de fruits très dense, que l’on fait cuire et qui, autrefois en tout cas, se servait chaude !
Mais les deux formules se sont joyeusement hybridées au fil des époques, des modes et de l’imagination des cuisiniers, tant et si bien que le terme charlotte désigne aujourd’hui n’importe lequel de ces entremets, biscuits et pain pouvant se décliner selon une infinie variété, et crème à bavarois et compote se permettre elles aussi toutes sortes de fantaisies !
Quant au diplomate, c’est une sorte de pouding — l’ancêtre de toute cette catégorie d’entremets à base de pain ou de biscuits — qui se fait sans que les biscuits soient forcément bien ordonnés dans le moule (on peut faire seulement des couches sans tapisser préalablement le moule), que l’on peut lui aussi préparer à froid (pouding diplomate) comme une charlotte russe, ou par cuisson au bain-marie (pouding de cabinet). Traditionnellement, le diplomate se prépare presque toujours avec des fruits confits ou séchés (raisins, pruneaux, abricots) ou de la confiture.
Et pour illustrer mon propos, voici maintenant — comme promis le 19 novembre dernier sur www.facebook.com/GretaGarbureMagazine à l’occasion de la « Journée mondiale des Toilettes — une recette de l’époque victorienne : « Le pouding de cabinet » !
Le pouding de cabinet
(cabinet pudding)
Préparation : 20 min
Cuisson : 1 h
Repos : 3 h
Pour 8 personnes
1 grosse brioche (400 g) un peu rassise
200 g de macédoine de fruits confits (coupés en dés)
10 cl de kirsch
1 litre de lait
200 g de sucre en poudre + 1 cuillerée à soupe
1 sachet de sucre vanillé
6 œufs
20 g de beurre pour le moule
Préchauffez le four à 150 °C/thermostat 5. Beurrez légèrement un moule à charlotte {20 cm de diamètre) et poudrez-le d’un voile de sucre en poudre (la cuillerée).
Mettez les fruits confits dans un bol avec le kirsch. Coupez la brioche en tranches de 1 cm d’épaisseur.
Versez le lait dans une casserole et portez-le juste à frémissement.
Dans une terrine, fouettez les œufs entiers avec le sucre en poudre et le sucre vanillé jusqu’à ce que le mélange devienne légèrement mousseux. Incorporez peu à peu le lait chaud en continuant à fouetter.
Tapissez le fond du moule de tranches de brioche, puis parsemez de quelques fruits confits et d’un peu de kirsch de macération. Continuez à remplir le moule en alternant brioche et fruits confits. Terminer par de la brioche. Versez lentement la crème par-dessus à travers un chinois et laissez s’imbiber quelques minutes.
Enfournez alors à mi-hauteur, dans un plat creux à-demi rempli d’eau bouillante.. Laisser cuire 1 heure au bain-marie.
Laissez refroidir complètement au sortir du four, puis mettre 12 h au réfrigérateur.
Pour servir, démoulez au centre d’un plat rond.
Un peu de blabla
— On peut ne pas mettre de kirsch.
— On peut remplacer la macédoine de fruits par des cerises confites et des morceaux d’angélique.
Ou encore, par des raisins secs ou des abricots séchés.
— On peut accompagner le pouding d’une crème anglaise ou tout simplement de crème fraîche.
— Enfin, on peut le glacer le pouding façon diplomate en délayant 1/2 pot de marmelade d’abricots et 2 cuillerées à soupe de kirsch dans une casserole, en faisant chauffer la mixture quelques minutes et en versant ce nappage sur le pouding.
Paule
24 novembre 2013 @ 10 h 54 min
En fait, il semble bien que ça remonte aux Celtes qui enfermaient leurs viandes dans un sac de boyau qu’ils cuisaient dans un bouillon d’herbes et de racines. Selon les dialectes, ça s’appelait « poten, podin, put ou pud ».
Au fil des siècles, c’est devenu « bag pudding » (pudding en sac), une toile remplaçant le boyau.
gretagarbure
24 novembre 2013 @ 10 h 58 min
Le principe même du far breton… celui du « kig a farz » !
Desserts de grand-mère |
16 octobre 2014 @ 6 h 01 min
[…] Si vous êtes l’un de nos fidèles lecteurs, vous savez déjà qu’en français on doit écrire pouding et non pudding. On vous raconte ici le pourquoi du comment : http://gretagarbure.com/2013/11/24/les-mots-des-mets-la-saveur-cachee-des-mots-28/ […]
Nos mille-feuilles (nos feuilletages de la semaine) |
2 décembre 2016 @ 7 h 00 min
[…] Je ne suis pas sûre que l’on puisse réussir cette recette mythique aussi bien chez soi mais en tout cas, tous les secrets de pâtissier sont dévoilés si l’on veut s’en donner la peine. La recette des gaufres mais également toutes les autres recettes de cette maison (brioches, palmiers, tartes, gâteaux de voyage, etc.) qui fait chavirer tant de becs sucrés.J’ajouterai une petite précision toute personnelle : s’il est vrai que le pudding est emblématique de l’Angleterre, rappelons que c’est en Italie qu’il est né (budino) et que d’un point de vue lexical, la Grande-Bretagne est cependant redevable à la France. Voir plus de détails ici : https://gretagarbure.com/2013/11/24/les-mots-des-mets-la-saveur-cachee-des-mots-28/ […]