LÉO DUPONT – Paris
LÉO DUPONT
Marchand de vin et restaurateur
Paris 6e
C’est à Montparnasse que ça se passe, à deux pas du carrefour Vavin — et dans Vavin… il y a vin ! — et ça fait du bien au quartier, certes déjà pourvu en restaurants un peu chicos mais où un bar à vins « cave à manger » manquait cruellement.
En plus, l’endroit est mythique puisqu’il se situe à l’entrée de la rue de la Grande Chaumière qui fut, de la toute fin du XIXe siècle jusqu’aux années trente-quarante, LA rue des ateliers d’artistes à l’époque où Montparnasse était le creuset de la « nouvelle » peinture française et grouillait d’intellectuels (Max Jacob, Blaise Cendrars, André Breton, Apollinaire, Léon-Paul Fargue, Jean-Paul Sartre, Jean Cocteau, Raymond Radiguet), d’écrivains américains (Miller, Hemingway) et bien sûr de peintres (Picasso, Matisse, Juan Gris, Soutine, Chagall, Léger, Marcel Duchamp, Fujita, Bourdelle, le Douanier Rousseau et j’en passe), sans oublier leur muse (et amante) à tous : Kiki de Montparnasse, immortalisée par Man Ray. La rue de la Grande Chaumière fut plus précisément le repaire de Gauguin et de Modigliani.
Et au 16 — où se tient le bar à vins — il y avait déjà un bistrot qui fut repris par Castelucho-Diana, le premier marchand de couleurs à s’établir dans la rue. Pour l’anecdote, c’est lui qui vendra et fera livrer à Picasso la toile brute sur laquelle le maître peindra Guernica.
Le lieu redeviendra un bistrot dans les années 60.
L’une des choses qui frappent le plus quand on a poussé la porte de la pimpante devanture ripolinée en jaune poussin et qu’on s’est avancé jusqu’à la salle du fond, c’est donc le beau volume de la verrière lumineuse qui évoque l’un de ces ateliers qu’on imagine autrefois encombrés de chevalets, de toiles, et d’amis un peu miséreux tâtant certainement de la bouteille mais crevant de faim.
Alors, je ne sais pas pour vous, mais moi qui ai un passé d’étudiante en Histoire de l’Art, ça m’émeut et le lieu me parle tout de suite. Patrick s’attarde d’abord dans la première salle car, avec son long comptoir, c’est là que se tient la cave à vins et tous ses trésors et c’est quand même sa partie.
Mais il fait soif et le verre de l’apéro — un menetou-salon 2012 du domaine Philippe Gilbert — est le bienvenu.
Nous en profitons pour faire notre choix sur une carte courte mais plaisante, comme j’aime bien. D’une part, ça évite de se prendre la tête pendant des heures pour se décider et d’autre part, ça laisse à penser que les produits sont frais et que tout est fait maison, ce qui est le cas ici.
Comme il fait un peu frisquet en cette fin novembre, j’opte pour la « soupe de châtaigne au foie gras » (12 €) tandis que Patrick, plus audacieux, ose un « tartare de haddock et poire au vinaigre de cidre (avec céleri-branche et coriandre) » (12 €) que je goûterai quand même puisque nous partageons (presque) tout équitablement. Le foie gras « au naturel » vient de la maison Cauna dans les Landes (ferme de Jean Sarthe, Les Délices de Saint-Orens).
Ces deux entrées sont épatantes, cuisinées avec simplicité mais élégance, très goûteuses, et nous laissent augurer d’une suite émoustillante pour nos papilles.
Comme ces deux premières assiettes sont un peu disparates (chaud et froid ; légumes/foie gras et poisson fumé/fruit), nous avons gardé le même vin, même s’il y aurait sans doute eu des accords plus pertinents. Mais tout va pour le mieux.
Nos plats arrivent, réjouissants à souhait à l’œil et, nous allons le découvrir aussitôt, encore plus en bouche. Notre choix s’est porté sur un « onglet de veau grillé, jus de veau au poivre de Setchuan, pommes de terre rissolées, pleurotes et lardons » (21 €) pour Patrick qui a une prédilection pour l’onglet, et un « suprême de pintade fermière, poêlée de légumes (poireaux, carottes, panais, chou romanesco) » (plat du jour du menu à 20 €) pour moi qui suis dans un cycle très « volailles ».
Les cuissons sont ajustées au petit poil, le suprême est un vrai suprême — comme expliqué ici : http://gretagarbure.com/2013/12/28/les-mots-des-mets-la-saveur-cachee-des-mots-30/ —, les garnitures joliment travaillées, l’harmonie des saveurs fonctionnant comme un camaïeu.
En un mot, nous sommes heureux, nos palais et nos estomacs aussi !
Bravo donc à Émilie qui s’occupe du contenu des assiettes !
Nous accompagnons nos plats du même vin : un rasteau 2010 domaine du Trapadis (Helen Durand vigneron) qui fonctionne assez moyennement avec les deux mais qui est fédérateur sur deux plats antinomiques. Quoique le reuilly qui suivait aurait été beaucoup plus adapté.
Bon, comme souvent — quand il n’y a pas de baba ! — je renâcle un peu devant le sucré et préfère terminer mon repas par une « assiette de fromages » (12 €). Ce n’est pas le cas de Patrick qui s’octroie des « croustillants au sésame, crème à la fleur d’oranger et cerises amarena » (9 €), un dessert tout en légèreté.
Pas vraiment avec mais histoire de goûter un vin supplémentaire, nous buvons un Reuilly 2013 de chez Jacques Rouzé.
Et c’est là que se manifeste l’enthousiasme délirant de Patrick :
Eh bien oui parce que j’ai plus souvent l’habitude d’incendier les cartes des restaurants qui plument le con-sommateur plutôt que de leur tresser une couronne de laurier mais là « pas d’aigreur, c’est le sieur » Armand qui nous réjouit à la fois le cœur et l’esprit !
Dans l’assiette comme dans le verre, on a rendez-vous avec le plaisir, c’est déjà bien, mais aussi et c’est plus rare, avec l’honnêteté ! Quand on reconnaît les vins et les noms de tous ces producteurs, amis ou brièvement rencontrés, on devine que l’on est dans une bonne maison. De plus, d’un simple coup d’œil à la colonne de droite, on sait immédiatement que l’on va pouvoir s’offrir de beaux plats ET de jolies bouteilles, sans piocher dans son compte-épargne-logement.
Croyez-en notre longue expérience des cartes de vins indigentes et aux tarifs injustifiés, vous serez en face d’un des meilleurs rapports prix-sourire de tout Paris. Faites votre choix ou confiez votre sort au patron, vous ne le regretterez pas.
Son discours est celui d’un véritable amoureux des produits, solides et liquides. Les connaisseurs seront en pays de connaissance ; quelques exemples qui vous parleront ou pas :
Carte des vins rouges :
Carte des vins blancs :
Vignerons bios, nature ou traditionnels et grands amateurs ne s’y trompent pas : l’endroit est en train de devenir une adresse culte, in-con-tour-na-ble !
Cave à manger ou restaurant à boire, on s’y sent bien. Greta Garbure y a évidemment déposé son rond de serviette.
Invitation d’une attachée de presse.
Blandine & Patrick
Léo Dupont
16, rue de la Grande Chaumière
75006 Paris
M° Vavin
Tél : 01 43 29 43 31
Site : www.leodupont.com
Programme des expositions sur internet.
Michel Smith (@PourleVin)
29 janvier 2015 @ 19 h 02 min
Rien que la vue du Berlioz sur la carte des vins me laisse penser que l’endroit est bon et fréquentable. mais quel appétit vous avez tous les deux !