Brousse provençale et brousse du Rove marseillaise au lait de chèvre : les presque jumelles de notre saga
C’est une bonne pâte
douce et délicate
cette niçoise de l’arrière-pays,
là où coule la Vésubie,
— on la trouve aussi près de Marseille —
car elle fait merveille
aussi bien dans les recettes salées
que dans les desserts sucrés.
D’ailleurs pour mieux exhiber sa douceur,
elle montre sa chair aimable sans pudeur
puisqu’elle n’a pas de croûte
et que, dénudée, elle s’offre toute.
Élaborée à partir de lait de brebis
parfois complété par du lait de chèvre,
la provençale n’a rien de mièvre
malgré sa texture de Chantilly
et sa saveur douce et crémeuse,
tout en fraîcheur.
Elle est préparée avec la partie caséeuse
du lait, que l’on porte à ébullition
en la fouettant avec vigueur,
comme s’il s’agissait d’une punition.
C’est de là que lui vient son nom d’ailleurs,
car brousser signifie « battre, remuer, fouetter »,
dans la langue vernaculaire,
— en prime… leçon de vocabulaire ! —
et brousse, celui du fromage pastoral
quand il est à son stade final,
prêt à consommer.
Heureusement, ça n’évoque pas trop la douleur.
Elle est si douce,
la brousse !
Une fois le caillé chauffé et fouetté,
il demande encore à être égoutté
dans une assiette en terre vernissée,
creuse et perforée,
garnie d’une mousseline ténue,
où l’on verse le fromage frais battu.
Assiette sur un autre récipient elle-même posée.
Après ce premier égouttage,
on verse alors le fromage
dans des sortes de faisselles métalliques
hautes et étroites, de dimensions variables,
mais à plus petits trous.
La brousse est prête pour la dégustation !
Il suffit de la démouler dans une boîte en plastique
au moment opportun pour qu’elle soit transportable.
Petits et grands s’en régaleront,
nature ou assaisonnée, selon le goût.
Mention spéciale à la brousse du Rove
qui se fabrique quant à elle avec du lait de chèvre cru
de la race chèvre du Rove
— race caprine rustique
adaptée aux collines de l’arrière-pays provençal —
sans présure ni ferments
mais additionné de vinaigre d’alcool.
Les grumeaux obtenus
sont moulés dans des formes coniques
de 12 cm de long.
Véritable fleuron
de la tradition ancestrale,
il faut la déguster rapidement.
Sa texture est fine et légère,
intense et friable,
onctueuse et désirable.
Peuchère !
Cette petite merveille
est particulièrement prisée à Marseille
même par les cagoles !
La brousse est au meilleur de sa forme
en hiver, au printemps et en été.
Aux herbes de garrigue, sa pâte uniforme
peut être parfois parfumée.
Riche en matières grasses (45 %),
elle accueille avec hospitalité
fines herbes, oignons, échalotes et ail hachés,
ce qui lui donne véritablement
l’accent provençal,
sans que ce soit pour autant caricatural.
Mais une larme d’eau de fleur d’oranger
et une coulée de miel
font ressortir sa féminité
et la rendent encore plus sensuelle.
La douce serait-elle
bi-sexuelle ?
Texte © Blandine Vié