Le Cassoulet
Le phénoménal cassoulet
de Greta Garbure
ou
la trilogie des cassoulets
(Castelnaudary, Toulouse, Carcassonne)
codifiée en une seule et même recette
Le grand cuisinier Prosper Montagné (carcassonnais d’origine) faisait un parallèle entre le cassoulet et le mystère de la Sainte-Trinité : « Le cassoulet est le Dieu de la cuisine occitane ; Dieu le père c’est le cassoulet de Castelnaudary, Dieu le fils celui de Carcassonne, et le Saint-Esprit celui de Toulouse. »
Pour Curnonsky, les cassoulets ne sont pas trois mais quatre comme les mousquetaires : le cassoulet de Castelnaudary au confit d’oie ou de canard, celui de Toulouse à la poitrine de mouton, à la fameuse saucisse éponyme et à la tomate, le cassoulet de Carcassonne avec ses côtelettes de porc, et le cassoulet des Corbières dans lequel la queue et l’oreille de cochon demi-sel sont indispensables. En saison, on peut même l’agrémenter d’une perdrix.
Alors, au risque d’en choquer certains, je vais vous donner ici la recette d’un « cassoulet pluriel », recette que j’ai attribuée à Bérurier, le magnifique adjoint du commissaire San-Antonio, dans mon bouquin « San-Antonio se met à table (Fleuve Noir, 2012, 21 €).
Avec son appétit gargantuesque, il ne pouvait que faire une mesclagne rabelaisienne des trois recettes ! Et comme vous le savez, cela ne pouvait que séduire Greta Garbure dont je vous rappelle que la devise est : « Mets-m’en trop ! »
Traditionnellement, le cassoulet se prépare dans un grand plat en terre cuite d’Issel baptisé « cassole », d’où le nom de cassoulet !
Bien évidemment, chacun pourra adapter la recette à son gré selon son goût, sa gourmandise, son appétit et son orthodoxie, comme par exemple privilégier certaines viandes et en écarter d’autres pour être plus proche d’une des trois versions puristes de la recette (voir les particularités identitaires ci-dessus). De toute façon, la marche à suivre est la même !
La recette
Préparation : 1 h
Trempage : 12 h
Cuisson : 3 h 30 à 4 h
Pour 8 à 12 personnes (au moins)
• 2 kg de haricots blancs secs (lingots du Lauragais)
• 750 g d’épaule ou de collet d’agneau (ou les deux mélangés)
• 750 g de jarret de porc demi-sel
• 400 g de travers de porc demi-sel coupés en morceaux
• 1 queue de cochon demi-sel
• 1 oreille de cochon demi-sel
• 400 g de couennes de porc fraîches
• 750 g d’échine de porc
• 500 g de lard de poitrine demi-sel
• 250 g de jambon cru de pays
• 600 g de confit d’oie ou de canard
• 400 g de saucisse de Toulouse
• 3 carottes
• 2 oignons
• 1 tête d’ail
• 50 cl de bouillon de volaille
• 2 bouquets garnis (thym, laurier, persil plat)
• 2 branches de sarriette
• 4 tomates
• 1 cuillerée à soupe de concentré de tomates (1 petite boîte)
• 200 g de graisse d’oie ou de canard
• sel fin, poivre du moulin
(Je vous rappelle que je vous donne ici les proportions toutes viandes confondues mais que vous pouvez parfaitement ne mettre QUE les viandes traditionnelles propres au cassoulet chaurien (de Castelnaudary), toulousain, carcassonnais ou des Corbières. Quant à la tomate, en principe on n’en met guère que dans le cassoulet toulousain et elle est même jugée hérétique dans les autres cassoulets.)
La veille, faites tremper les haricots dans une terrine d’eau froide, en renouvelant l’eau plusieurs fois pour éviter les risques de fermentation.
Mettez également toutes les viandes de porc demi-sel (si vous en mettez) à dessaler dans une bassine d’eau froide. Renouvelez l’eau plusieurs fois. Faites tremper les couennes à part.
Le jour même, égouttez les viandes demi-sel, épongez-les. Plongez-les (sauf le lard) dans une marmite d’eau froide avec un oignon clouté et un bouquet garni, portez à frémissement 1 h 30 minutes.
Simultanément, si c’est votre choix, coupez la viande d’agneau en morceaux. Faites-les rissoler dans une cocotte, dans 50 g de graisse d’oie. Salez et poivrez. Laissez presque roussir. Ajoutez deux oignons émincés et quatre gousses d’ail pelées, mélangez 2 à 3 minutes. Mouillez avec le bouillon et laissez mijoter 1 heure sur feu doux.
Jetez les haricots égouttés dans un autre faitout d’eau froide et faites-les blanchir en portant à ébullition 5 minutes. Égouttez.
Plongez le lard dans une casserole d’eau froide, portez à ébullition pendant 10 minutes, égouttez, coupez en gros lardons.
Égouttez les couennes, coupez-les en lanières. Jetez-les dans une casserole d’eau froide et faites-les blanchir 10 minutes. Égouttez.
Par ailleurs, dans un grand faitout, faites revenir l’échine de porc coupée en gros cubes dans 50 g de graisse d’oie, avec le jambon coupé en dés, les lardons, les carottes en rondelles et un oignon émincé, pendant environ 10 minutes, en remuant souvent.
Ajoutez alors les haricots soigneusement égouttés, les couennes, les tomates pelées, épépinées et grossièrement concassées et le concentré de tomates (dans le cas du cassoulet toulousain), les gousses d’ail pelées, le bouquet garni et les branches de sarriette. Poivrez. Mouillez largement d’eau (3 bons cm au-dessus du niveau des haricots, voir note). Portez à frémissement pendant 30 minutes en écumant souvent.
Introduisez alors dans le faitout le sauté d’agneau et les morceaux de confit débarrassés de leur graisse. Salez, mélangez soigneusement, couvrez et poursuivez la cuisson 30 minutes. Rectifiez l’assaisonnement en fin de cuisson.
Pendant ce temps, piquez la saucisse et faites-la cuire à la poêle dans 50 g de graisse d’oie, jusqu’à ce qu’elle soit bien rissolée. Égouttez-la et coupez-le en tronçons.
Préchauffez le four à 150 °C/th 5.
Égouttez les haricots et leurs viandes en gardant le jus. Égouttez les viandes de porc, coupez-les en morceaux, détaillez l’oreille aux ciseaux.
Montez le cassoulet et disposez tous les ingrédients (sauf la saucisse) dans un grand plat à four en terre, en les disposant harmonieusement par couches alternées. Ajoutez les morceaux de saucisse en les enfouissant à demi. Arrosez doucement avec le jus de cuisson tamisé, poivrez généreusement en surface et parsemez du reste de graisse d’oie.
Enfournez à mi-hauteur et faites gratiner 2 heures 30 à 3 heures, en enfouissant à plusieurs reprises la croûte blond-doré qui se forme en surface, sans écraser les haricots. Rajoutez chaque fois un peu de bouillon de cuisson si nécessaire pour que le cassoulet soit bien moelleux.
Servez brûlant au sortir du four.
Un peu de blabla
• Le choix des haricots dépend de votre goût et de votre géolocalisation : lingots du Lauragais, cocos de Pamiers, voire gros tarbais. Sachez qu’on compte environ 100 g de haricots secs par personne, mais ce n’est pas un problème s’il y en a plus, le cassoulet se réchauffe très bien.
• Une pré-cuisson des viandes et des haricots est nécessaire. On peut toutefois raccourcir légèrement les temps si l’on prolonge la cuisson au four (4 à 5 h). Les haricots doivent tout de même être souples à cœur.
Dans ce cas, il est impératif de mouiller régulièrement le cassoulet de bouillon de cuisson pour que les haricots puissent gonfler et les viandes ne pas devenir sèches.
• Il faut obtenir un volume de bouillon 2 fois 1/2 à 3 fois supérieur à celui des haricots blanchis.
• Si vous utilisez un plat à four plutôt qu’une cassole, plus profonde, veillez bien à mouiller de bouillon chaque fois que nécessaire.
• On peut frotter le plat à four ou la cassole avec de l’ail avant d’y monter le cassoulet.
• Selon la tradition, il faut enfouir la croûte 7 fois de suite pour que le cassoulet soit réussi.
• Si vous préférez une cuisson plus courte au four, vous pouvez parsemer le cassoulet d’un voile de chapelure pour accélérer la formation de la croûte.
• Ne zappez pas la sarriette, elle limite les flatulences !
Michel Poymiro
4 février 2014 @ 9 h 52 min
Je m’y retrouve assez bien dans cette recette -je suis dans le Tarn. Personnellement, à la saison j’y ajoute la tomate fraîche et même une branche de céleri. Votre choix de viande est « royal » mais c’est vrai, c’est une trilogie de cassoulets…
Bonne synthèse, bon appétit à tous !
Cad
14 février 2014 @ 2 h 55 min
je ne commenterai pas la recette, je vis avec un Gascon (cong!) juste une précision, à ma connaissance, les cassoles , les vraies de vraies, y a plus guère que les frères Not à Mas Ste Puelles qui en fabriquent encore. Mais jusqu’à quand…
http://www.youtube.com/watch?v=4y9920iji6o