Autour d’un saumon de l’Adour

La scène se passe chez Bob à Biarritz. Eh oui, encore et toujours ! De temps en temps, histoire de rompre une monotonie qui n’existe pourtant jamais avec lui, il s’invente des raisons de réunir quelques amis, chefs ou anciens chefs. Ce matin, c’était autour d’un saumon de l’Adour, transformé façon darnes à papa et de pointes d’asperges (et d’ironie) avec une sauce béarnaise magistralement exécutée par l’ancien (mais toujours jeune) chef-patron du restaurant Campagne & Gourmandise : André Gaüzère. Ne manquent jamais à l’appel pour partager de bons moments, les immenses Maurice Isabal d’Ainhoa et Firmin Arrambide de l’Hôtel des Pyrénées à Saint-Jean-Pied-de-Port.


L’inénarrable, l’inarrêtable, le volubile Raymond Casau fait bien plus que compléter le tableau. Il le fait vivre par des anecdotes croustillantes sur chacun de ses passages dans les plus belles maisons de la capitale : Pré Catelan, Fouquet’s, Drouant, Ledoyen, Plaza, George V, Maxim’s… une constellation à lui tout seul !
Et pour célébrer — volontairement ou pas mais j’ai ma petite idée — le remplacement au Top 14 de Biarritz par La Rochelle, Richard Coutanceau du restaurant éponyme et Jacques Bourdin, ancien propriétaire de Chez André : deux personnages, figures tutélaires de la ville charentaise autant que maritime. Encore un paquet d’étoiles. Et puis les plumitifs : Bernard Carrère, l’éditorialiste de la Gazette Gourmande… et le gars de www.gretagarbure.com (n’oubliez pas de vous abonner, là, dans la colonne de droite).


Mais on papote, on papote et il est déjà 9 h 30 !
À table, tout le monde !
Même pas le temps de faire des photos !
Le saumon sauvage est parfaitement cuit sur une plancha douce, sensible, tenue par un Firmin intransigeant sur la préservation de l’onctuosité de ce seigneur des gaves. Un vrai goût de printemps dans l’assiette, une sensation de fraîcheur.
Un poisson, ça sent ce que ça mange. Et honnêtement, on doit reconnaître que le saumon d’élevage, que dis-je de batterie, a trop souvent une odeur tenace pas franchement ragoûtante. Un jour, les industriels auront l’idée et les moyens de parfumer leurs saumons puants ! Pour autant, ils ne pourront malheureusement pas masquer les effets polluants des tonnes d’excréments, de parasites, d’antibiotiques et de pesticides rejetés dans nos océans ou fixés dans les chairs de ces grossières copies de poissons libres.
Les pointes d’asperges fondent à l’unisson dans des bouches avides, titillées par la parfaite béarnaise.
Pour mémoire, la recette se trouve là :
http://gretagarbure.com/2014/05/30/savoir-faire-26/
Un jurançon sec eut été à sa place. Mais non, pas aujourd’hui. L’occasion était belle de goûter le délicieux vin de Sylvia Magalhaes. Issu d’un joli terroir argilo-calcaire du nord du Portugal, ce vinho verde est un pur Alvarinho. Proche cousin de l’Albariño galicien légèrement moins expressif, il a tout ce qu’on peut demander à un vin blanc… au petit-déjeuner, mais pas que ! Aromatique sans excès, une pointe de salinité bienvenue pour l’accompagnement de notre saumon, une bonne densité en bouche, équilibré par une vivacité idéalement primesautière. Ce Palaccio Da Brejoeira se boit avec bonheur dès les premières années de sa vie publique. Des notes oxydatives se révèlent au bout d’une dizaine d’années et il ravit alors les palais des connaisseurs britanniques, friands de ces nuances si séduisantes que l’on trouve dans les vieux madères. Et alors, l’accord s’impose avec les fromages que nous a apportés notre belle Olga : brebis de la vallée d’Ossau ou des bergers de Garazi.
J’entends les langues des chefs qui claquent.


Encore un p’tit déj de compétition, Mister Bob !

Tiens ! À la prochaine occase, je vous raconterai tout ce qui me lie à ce zigoto.