Tête, hure, museau, groin : que des grandes gueules !
Museau (de bœuf ou de porc) vinaigrette, groins de porc aux lentilles, pâté de tête ou fromage de tête (préparé avec des petits morceaux de viande de porc, plus particulièrement issue de la tête — joues, groin, langue —, à l’exception des oreilles, des yeux et de toutes les parties cartilagineuses), fromage de tête en ballon (moulée dans le « cuir » — ou couenne — de la tête), galantine de tête de porc à la gelée, terrine de hure de cochon, terrine de hure de sanglier, hure de marcassin, presskopf (tête pressée) alsacien, tête de veau (entière ou roulée) sauce gribiche, tête pressée en Belgique, tête fromagée au Québec, tête marbrée en Suisse, tête de mouton (bouzelouf) au four au Maghreb, voilà des plats qui ont de quoi faire tourner la tête des gourmands !
Mais pourquoi qualifier les têtes de certains animaux de… « têtes » et les autres de « hures » ?
C’est pourtant très simple ! En charcuterie, on désigne sous le nom de tête tout ce qui est arrondi — par conséquent celle du veau — et sous le nom de hure tout ce qui est pointu ou piquant, comme les têtes de porc ou de sanglier.
Pour cette même raison, on appelle également « hure » la tête des poissons tels que brochets, saumons, esturgeons.
Il est d’ailleurs intéressant de noter que le nom des Indiens Hurons provient lui aussi de ce mot car ils portaient une sorte de crinière ressemblant à celle des sangliers.
Enfin, dans cette fricassée de museaux, il faut faire la distinction entre mufle et groin. Ainsi, le veau possède un mufle… et non un groin (réservé au porc et au sanglier) comme il m’est arrivé de le lire sur certains menus. Quant au cheval, il a des naseaux.
Vous me direz, pourquoi se mettre martel en tête pour si peu alors que les chefs eux-mêmes — et, détail cocasse, on remarquera au passage que le mot « chef » signifie lui aussi… tête — y perdent joyeusement leur latin et baptisent parfois les unes et les autres avec une fantaisie pour le moins débridée sur leurs cartes ! Même que, quelquefois « têtus », on se demande s’ils n’ont pas la grosse tête à force d’inventer des intitulés ronflants ou sans queue ni tête.
Eh bien moi aussi je n’en fais qu’à ma tête car sauvegarder les bonnes appellations de notre patrimoine gastronomique, je trouve que c’est un devoir… « capital » (mot qui fait aussi référence à la tête) !
Blandine Vié
Les mots des mets (la saveur cachée des mots) |
21 avril 2013 @ 7 h 59 min
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