L’œil du vin
C’est un joli rituel que boire un verre de vin.
Mais toujours un mystère, léger ou clandestin.
Qu’y a-t-il dans ce verre, à part du jus d’raisin ?
Parfois, c’est vrai, il ne se passe presque rien.
Quelquefois, c’est une promenade dans un jardin :
des fleurs, des fruits, et le printemps comme un refrain.
D’autres fois, le vin se fait sensuel, voire câlin.
Doux, gras, rond, caressant : velours, soie et satin !
Une histoire commence, un amour fait son levain.
Il y a aussi les vins pour boire entre copains.
Gouleyants et joyeux, qui coulent avec entrain.
Puis les vieux, les jeunes, les « nature », les incertains.
Toute une gamme où chacun prend ce qui lui convient.
Des passe-partout pour ceux qui n’y connaissent rien,
des vins-révélations qui vous en bouchent un coin.
Hélas aussi, question de chance ou de moyens,
ceux qu’on ne boira jamais — jamais ! — c’est certain !
Toujours, avant que mon verre n’arrive à sa fin,
je le regarde au fond des yeux, droit en son sein.
Pour connaître ses tripes, et aussi mon destin…
Qu’y a-t-il donc au fond du verre ? Au fond ?
N’est-ce pas la seule, l’existentielle question ?
Chaque fois que j’ai plongé mon regard dans le sien,
l’œil était dans le verre et regardait le mien !
Quelle histoire d’amour entre nous ! Moi, toi… le vin !
Toujours tu m’accompagnes, quel que soit mon chemin !
Comme un indéfectible ami qui veille au grain,
qui partage mes petits bonheurs, même anodins…
… et ma mélancolie à n’être qu’un pantin.
Qu’y a-t-il au fond du verre ? Tout au fond ?
N’est-ce pas la seule, l’existentielle question ?
Chaque fois que j’ai plongé mon regard dans le sien,
l’œil était dans le verre et regardait le mien !
Pour sûr, au fond de mon verre j’ai vu l’âme du vin.
Je sais qu’elle est là quand la vie se fait chagrin.
Mais elle m’a dit aussi que la vie est regain.
Cad
9 juillet 2014 @ 14 h 48 min
« L’oeil était dans le verre et regardait le mien »
Beau clin.. d’oeil…
Qui me rappelle des souvenirs d’enfance, mon grand père souffrait d’alcoolisme chronique. Chez nous, lorsque j’étais enfant, oui, il y avait du vin, pas à tous les repas, et les jours de fête où le « Pépé » était là, c’était un peu compliqué. Il n’avait pas le droit d’y goûter, ça faisait parfois des drames. Je crois que ce « pauvre vieux » (il est mort à 56 ans et 2 jours, mais quand on n’a pas encore 6 ans, c’est très très vieux) ne voyait pas un oeil dans son verre mais son âme. Et moi, qui avais la même interdiction que lui, je passais beaucoup de temps à la fin du repas, dans la cuisine, à regarder le fond des verres. Et ce qui m’intéressait c’était non pas de voir s’il y avait une âme ou un oeil au fond des verres, non, je voulais comprendre pourquoi des boissons d’aussi belles couleurs (mon père était notamment fan de vins du Jura en général, vin jaune en particulier) m’étaient interdites. Je finissais volontiers les fonds de verres. Curiosité. Eveil des papilles.
« Qu’y a -t-il au fond du verre », demandes-tu…
Qui y a -t-il au fond du verre…je demande…
L’oeil qui te regarde, tu réponds.
Des visages, aussi. Assurément.