J’ai fait mon marché avec Madame Bobo…
Madame Bobo ne jure que par le bio ! À tel point qu’on l’appelle désormais Madame Biobio !
Avant tout, elle achète ses légumes dans une AMAP (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) car elle tient à manger locavore. Des relais locavores, ça existe même à Paris dont les couronnes maraîchères ont pourtant fait place à des cités plus ou moins radieuses.
Pour Madame Biobio, c’est un geste citoyen ! Cela dit, l’hiver surtout, elle en a un peu ras-le-bobol !
Parce que du panais et des rutabagas toutes les semaines pendant trois mois, ça lasse. En plus, c’est pas pour dire mais les légumes oubliés, ça fait péter !
Si, si, Madame Biobio pète aussi ! Elle a beau s’envelopper dans son grand châle indien pashmina à motif cachemire démodé depuis les années 90, lorsqu’elle va jouer au bridge chez les Dupont-Dubois, ses vents ne passent pas toujours inaperçus, ni à l’oreille ni au nez ! Elle a beau tousser en même temps, son étole vintage ne camoufle rien.
Bref, la moitié au moins du cageot hebdomadaire finit chez sa gardienne pour qui la bienséance n’est pas une histoire de séant.
Mais du coup, Madame Biobio n’a plus son comptant de légumes. Alors, pour ses dîners, elle complète par des surgelés Picard !
Et puis confidence pour confidence, ceux-là, y a pas besoin de les éplucher et c’est tant mieux ! Parce que le cerfeuil tubéreux et les navets boules d’or, ça vous ruine une french manucure en moins de temps qu’il ne faut pour le dire !
Madame Bobo est locavore et pourtant, elle ne jure que par le poivre Tchuli du Népal (qui a détrôné le poivre de Sarawak), la fleur de sel fumé Maldon (qui a détrôné le sel de Guérande, puis le sel de l’ïle de Ré, puis le sel de Camargue, puis le sel de l’Himalaya et le sel noir d’Hawaï), le citron-caviar (qui a détrôné le citron yuzu), le thé macha pour la pâtisserie, le thé vert et le jus de grenade (antioxydants… et c’est bon pour sa peau !) dont on sait qu’ils sont toujours récoltés dans des conditions scrupuleusement équitables !!!
Bon, Madame Biobio mange aussi de la viande. Pas souvent, mais d’une qualité remarquable ! Pensez, elle ne se fournit que chez… ou chez…! Il faut avoir les moyens tout de même. Mais quand elle et son mari reçoivent des amis, ça fait son effet ! Avec les fagots de haricots Picard en garniture, c’est bluffant ! Surtout, y a presque rien à faire…
Madame Biobio mange aussi de la volaille. Comme elle se documente — elle est abonnée aux meilleurs magazines culinaires —, elle est imbattable sur les races cous-nus à chair fine, les volailles de Bresse et autres challandaiseries. Néanmoins, au quotidien, elle fait ses courses à Monoprix et achète des découpes de poulet Label Rouge, quand bien même ce label n’est plus ce qu’il était et n’offre que des garanties de polichinelle. Car le label ne fait pas toujours la bête !
Bien entendu, à sa table, on ne sert que du fromage au lait cru ! Le seul à être digne de ce nom ! Mais elle met de la Vache-qui-rit® dans son velouté de courgettes et fait ses gratins à l’emmental râpé fabriqué sans croûte, une cagade industrielle dont elle ne manquera pas de s’offusquer le jour où elle en apprendra les secrets de fabrication.
Comme ce fut le cas quand elle apprit comment on fabriquait le surimi alors que préalablement, elle en proposait toujours à l’apéritif ! « Le secret, c’est de les passer 10 minutes au congélateur avant de les servir ! » disait-elle non sans emphase ! « Une de mes trouvailles ! » Tu parles !
Elle est évidemment addict aux macarons qu’elle va acheter chez… ou chez… ou chez… Et comme ils sont griffés, elle n’est pas regardante sur les colorants, forcément naturels !
Ah ! les mots nature et naturel ! Ils sont magiques ! Parés de tous les fantasmes sinon de toutes les vertus !
Pour le reste, Madame Biobio a son carnet d’adresses : le pain chez Machin, le beurre Bordier chez Truc, le thé vert chez Tartempion, etc. Sans compter qu’elle fait venir ses confitures d’Alsace, son huile d’olive du Lubéron, ses truffes — of course ! — de Lalbenque, et j’en passe !
Madame Biobio a aussi une marotte ! Elle trouve ça plus chic de servir ses petits plats dans des bocaux ou des boîtes de conserve que dans son service en porcelaine de Limoges !
Un jour, elle a acheté 12 boîtes de corned-beef dont elle a jeté le contenu — et après ça vient vous faire la leçon sur le commerce équitable ! —, elle les a lavées (enfin, le lave-vaisselle !) et elle les a réutilisées pour servir son entrée ! Trop fun, non ?
Y a des fois, je me demande si bobo, finalement, c’est pas un raccourci pour « bobo à la tête » !
Et puis quoi encore ?
Ah oui ! Théoriquement, après avoir troqué ses ballerines Repetto pour chausser ses Converse®, elle fait ses courses à vélo ! Un vélo hollandais s’il vous plaît, c’est quand même plus chic qu’un vélib !
Mais les courses, c’est pas vraiment pratique à rapporter à bicyclette malgré le joli panier acheté à l’île de Ré et posé en figure de proue sur la roue avant. Alors, souvent, elle y va en 4 x 4 ! Voui, voui, voui ! Ou mieux encore, chez Monop, ils s’occupent de la livraison ! C’est cool, non ?
Bref, question nourriture — mais pas que — notre Madame Biobio est parfois très approximative malgré ses certitudes.
Et surtout, un peu « prout-prout », comme on dit !
Quoi ! Qu’est-ce que j’ai dit ?
On lui souhaite quand même bon vent ?
Blandine Vié
Hier, j’ai fait le marché avec Monsieur Popu… : http://gretagarbure.com/2014/06/16/saynetes-5/
17 juin 2014 @ 7 h 06 min
Encore plus drôle qu’hier ! il doit y avoir une belle poignée de blogueuses food qui pourraient s’y reconnaitre là… non, non, je ne pense à personne, suis trop loin de ce microcosme 😉
17 juin 2014 @ 8 h 52 min
J’adore vos récits. MDR. Continuez.
17 juin 2014 @ 17 h 17 min
M’est avis que vous maîtrisez à ravir le pet déguisé sous une toux d’apparat…
Saynètes | The fisheye of gourmet food &...
17 juin 2014 @ 19 h 44 min
[…] J'ai fait mon marché avec Madame Bobo… Madame Bobo ne jure que par le bio ! À tel point qu'on l'appelle désormais Madame Biobio ! Avant tout, elle achète ses légumes dans une AMAP (Association po… […]
18 juin 2014 @ 10 h 30 min
Cela fait plus penser aux bourges qu’aux bobos voire aux blogueuses food comme indiqué dans le com’ précedent, Vache qui rit gole en moins!
18 juin 2014 @ 11 h 11 min
Rappelons que le mot « bobo » est formé à partir du « bo » qui commence le mot « bo-urgeois » et du « bo » qui est au début du mot « bo-hême » ! Les bobos sont donc par essence des bourges… comme vous dites !
Pas de contresens de ma part, donc !
😉
26 juin 2014 @ 8 h 05 min
Excellent, bravo Blandine !