Fiasco chez « Tante Marguerite »
Fiasco chez « Tante Marguerite »
pour mettre en scène les vins
« Au pied du Mont Chauve » !
Car malgré ce nom musical,
ce ne fut guère un poème symphonique…
Déception que ce déjeuner de presse où je m’étais pourtant rendue avec enthousiasme. Comme chaque fois qu’il s’agit de découvrir un nouveau domaine ou/et un nouveau restaurant car je ne suis pas quelqu’un de blasé.
Et puis je ne reste jamais indifférente au nom de Bernard Loiseau pour qui j’ai écrit* les deux derniers ouvrages publiés de son vivant :
• La cuisine pour les enfants, (Albin Michel, collection « Jeunesse », 2000),
• Mes petits plats faciles et pas chers, (Albin Michel, 2002).
Le but de ce déjeuner était de goûter 6 vins du millésime 2011 (en réalité 5 + 1 de 2010) du domaine « Au pied du mont chauve » (35 ha) qui regroupe des parcelles situées parmi les plus beaux climats des villages de Chassagne-Montrachet, Puligny-Montrachet et Saint-Aubin, la plupart en biodynamie.
Tout nouveau, le domaine « Au pied du mont chauve » (le millésime 2011 est le deuxième à porter ce nom) appartient au groupe familial bourguignon Picard (depuis trois générations), nouvellement restructuré (les pôles Vins et Spiritueux sont désormais séparés) et dont Michel Picard a confié les rênes à ses enfants : son fils Gabriel dirigeant désormais la holding Picard (anciennement Picard & Spiritueux) et sa fille Francine s’occupant plus spécifiquement de la gestion de la signature « Au pied du Mont Chauve ».
Le repas a eu lieu chez « Tante Marguerite » à Paris dans le 7ème et c’est peut-être là où le bât blesse car ce déjeuner n’a pas véritablement mis les vins en valeur et les a même plutôt desservis.
D’une part parce que les accords mets et vins n’ont pas été judicieusement réfléchis — si toutefois ils l’ont été — et d’autre part, parce que la cuisine s’est hélas révélée plus qu’improbable.
Mais voici le menu :
Nous avons donc commencé par un verre de Saint-Aubin 1er cru blanc « le Charmois » (cépage chardonnay) à l’apéritif. Fin et élégant, qu’on boirait bien à table aussi.
Et puis l’entrée est arrivée, parée d’un nom enrubanné « Ballotine (avec un seul T svp) de foie gras de canard, chutney pomme-échalotes au xérès et marmelade de coing ». Hélas ! Le chef sait-il ce qu’est une ballotine… c’est-à-dire une pièce de viande désossée, roulée, farcie et ficelée pour la cuisson ? Visiblement non !
Car s’il y a souvent des ballotines AU foie gras, désosser un foie gras n’est pas chose aisée ! À tout le moins, s’il avait été déveiné, nous aurions été contents sinon contentés ! Mais pire, il était (beaucoup) trop cuit, gris et même pas débarrassé de son épaisse gangue de graisse qui faisait comme un bloc. Regardez la photo de près, elle vaut le coup d’œil ! La sauce sur la graisse, faut quand même le faire…
Avec ce foie surprenant ont été servis un chassagne-montrachet blanc 1er cru « Clos Saint-Jean » 2011 et un puligny-montrachet 1er cru « La Garenne » 2011. Malheureusement l’acidité marquée de la pomme verte conjuguée à la sucrosité affirmée de la marmelade ont empêché toute dégustation objective, altérant la subtilité des arômes et cassant les longueurs en bouche que l’on devine pourtant présentes même si un peu trop policées à mon goût.
Question subsidiaire : pourquoi le chutney (qui ressemblait plutôt à une mousse) — le chef aurait-il un problème avec les appellations ? — était-il d’un vert aussi cru. Ajout d’un colorant alimentaire ?
Pour suivre, un poisson annoncé comme « pavé de maigre rôti, asperges vertes et betterave crapaudine, jus de rôti aux câpres et citron confit ». Je fais la grimace ! Des asperges vertes fin septembre, voilà qui me hérisse rien qu’à la lecture.
Bon, changement de programme quand l’assiette arrive avec des brocolis, des courgettes et des rubans de concombre. Le citron confit s’est mué en rondelles de kumquat.
Là encore, déception : le poisson est un peu trop cuit. Pas aussi désastreusement que le foie gras, mais trop cuit quand même. Quant aux brocolis, ils sont aussi mous que des éponges et le concombre bien trop agressif pour la dégustation des vins : un chassagne-montrachet 1er cru « Les Chenevottes » 2010, complexe et tendu, et un saint-aubin rouge 1er cru « Pitangerets » 2011, dense et sur les fruits noirs, peut-être pas idéal sur le poisson, indépendamment de sa garniture.
Enfin le dessert : une « verrine de pêche Melba » accompagnée d’un chassagne-montrachet 1er cru « Les chaumées » 2011 (pinot noir) dont le nez très fruits rouges et la bouche « facile » s’accordaient avec bonhomie mais sans vrai béguin.
Bon, déception, donc !
À cause de ce repas-catastrophe dont on espère qu’il n’est qu’accidentel de la part du chef Pedro Gomes — encore qu’envoyer un foie gras sur table dans cet état, c’est juste pas possible ! — mais un peu à cause des vins quand même. Des vins techniquement bien faits et pour la plupart déjà « mûrs » (le millésime 2011 expliquant en partie cela), qui ont évidemment de l’avenir devant eux, voire une longue garde, mais qui ne m’ont pas procuré de réelle émotion.
Quant aux prix, ils font évidemment réfléchir.
Alors d’accord, c’est la Bourgogne, d’accord ce sont des premiers crus, mais si j’avais 56 euros à mettre dans une bouteille, sincèrement, mon choix se porterait ailleurs.
Le prix des vins :
– Saint-Aubin 1er Cru « Les Charmois » 2011 : 26 €
– Puligny-Montrachet 1er Cru « La Garenne » 2011 : 56 €
– Chassagne-Montrachet 1er cru « Clos Saint Jean » 2011 : 56 €
– Chassagne-Montrachet 1er Cru « Les Chaumées » » 2011 : 56 €
– Saint-Aubin 1er Cru « Pitangerets » 2011 : 24 €
– Chassagne-Montrachet 1er « Les Chaumées » 2011 : 46 €
En vente au « Repaire de Bacchus ».
Blandine Vié
* Non pas en tant que « nègre », mais en tant que « collaboratrice », comme mentionné très expressément sur les pages-titres.
Francine Picard
« Au pied du Mont-Chauve »
5, chemin du Château
21190 Chassagne-Montrachet
Tél : 03 80 21 98 57 + 06 74 82 34 82
Courriel : francine.picard@domainesfamillepicard.com
Visite du domaine et dégustation : 15 €.
Il y a aussi des chambres d’hôtes au domaine : 260 € la nuit (petit-déjeuner + visite).
Tante Marguerite
5, rue de Bourgogne
75007 Paris
26 septembre 2013 @ 9 h 53 min
Encore un qui confond ballot et ballottine. Ces plats sont en effet très surprenants pour ce type de vins.
P’tit billet d’humeur |
27 septembre 2013 @ 7 h 01 min
[…] Voir notre expérience désastreuse chez « Tante Marguerite » : http://gretagarbure.com/2013/09/26/dejeuners-de-presse-6/ […]
27 septembre 2013 @ 18 h 14 min
260 € la nuit au domaine ? Le lit est « garni » à ce prix-là, j’espère…
28 septembre 2013 @ 23 h 42 min
Bref, tout ça, c’est un métier. On l’oublie un peu vite