Dégustation en duplex chez Pottoka
Blandine à Paris et Patrick à Bayonne !
Osons le dire : une première mondiale !
En voilà une idée originale, non ? Ayant reçu des informations sur ces deux restaurants, on a eu la tentation saugrenue de proposer à Sébastien Gravé cette dégustation complice… ou pour une fois duplice puisque j’habite à Paris et Patrick à Bayonne !
Nous voici donc en route pour un déjeuner de janvier, moi dans la capitale chez « Pottoka » et Patrick chez sa petite sœur bayonnaise : « La table de Pottoka ».
Pour la logistique, on a préféré les textos plutôt que le portage de messages par l’intermédiaire de pottoks, le pottok étant cette race de poneys très ancienne (puisque déjà présente au paléolithique) vivant dans les montagnes du Pays basque, et qui a donné son nom au restaurant. Pourquoi ? Parce que Sébastien Gravé est natif du cru, tiens !
— « Et puis que « Pottoka » est la mascotte de l’Aviron Bayonnais ! » me souffle Patrick.
On plante le décor ?
Et toi, Patrick ?
Comme il est en 5 plats, il est temps d’attaquer par une petite mise en bouche : un « tartare d’espadon et poire, avocat, écume betterave et cake olive/piquillos » dans lequel je décèle aussi des pignons. Il m‘est servi avec un verre de petit chablis Hautérivien 2014 du domaine Pommier. J’apprécie le tartare et le trouve apte à bien préparer les papilles à du plus sérieux. L’accord avec la poire est pertinent et l’avocat qui joue le rôle de liant apporte une belle onctuosité mais l’écume de betterave ne m’enthousiasme guère car elle masque la subtilité de l’assemblage des autres ingrédients. Et je trouve que sa saveur douceâtre n’est pas raccord avec la forte personnalité des olives noires et des piquillos. Tu es d’accord, Patrick ?
Pour ma part, j’ai été sensible au vin qui me tient lieu d’apéritif, issu d’une biodynamie maîtrisée par le domaine Riberach (2014) dans le Roussillon.
Ah ! Ben j’ai eu droit à la déclinaison : œuf coulant en voile de comté, gésiers confits et champignons, crémeux de fromage et chips de riz ». Mon œuf à moi était presque « parfait », comme indiqué sur la carte : délicieux ! À cette occasion, j’ai craqué pour le pain frais nature, pas trop salé.
L’oxydation prématurée de l’irouléguy blanc 2014 du domaine Abotia ne m’a pas dérangé sans toutefois me convaincre.
En revanche, les Saint-Jacques qui ont suivi, encore accrochées et cuites dans leurs coquilles composaient de belles bouchées avec un jus corsé et de minuscules croûtons croquants. Sans être fou de l’alliance poisson/vin rouge, je dois reconnaître que le chinon 2014 du domaine du Roncée était à sa place. Tentative méritoire : essai transformé !
À Paris, moi j’ai eu un « lieu jaune rôti à la ventrèche, racine de persil en 3 façons » : confite au parmesan, purée et chips, bouillon au safran ». Le lieu était cuit à la nacre mais rhabillé avec une fine tranche de ventrèche bien croustillante en guise de peau : un contraste émouvant. Et la racine de persil fut pour moi une belle découverte gourmande. Un plat dont je me souviendrai ! L’irouléguy 2014 du domaine Abotia qui l’accompagnait et que tu avais bu plus tôt n’était peut-être pas le vin que j’aurais choisi mais en fin de compte, sur le côté terreux de la racine de persil, ça fonctionnait assez bien.
On passe au plat de résistance ? Plat de résistance ! Quelquefois, c’est le convive qui doit en avoir de la résistance, non ? Pour avoir encore assez faim…
Bon, tout va bien ! Rien que la vue du « Confit de joue de cochon au lard de Colonnata, haricots tarbais et pickles d’oignons » qui arrive sur ma table me requinque et réactive mon appétit. Voilà typiquement le genre de plats que j’aime ! Enfin… encore plus que les autres ! Tout est moelleux en bouche et le lard juste fondu assure une liaison parfaite entre tous les éléments. Un régal !
Et je trouve que le verre d’irouléguy rouge 2013 du domaine Mignaberry qui l’accompagne s’accorde parfaitement avec le contenu de mon assiette. Ah ! Il y a des jours où la vie est plus belle que d’autres. Tu partages cette euphorie ?
À la vue de mon assiette, j’étais dubitatif : filet de canette rôti aux dragées, croquettes de ricotta, condiment datte, mousseline de patate douce ». Et puis, et puis… inutile de chercher la p’tite bête, la vérité s’impose : tout est réuni pour faire un beau plat ! La cuisson me convient, la chair puissante mais au grain fin est enrobée par le sucre des dragées concassées, stimulée par leur croquant, l’accord sucré-salé est amplifié par la patate douce et les touches de dattes. La ricotta en croquettes fondantes ajoute du liant en bouche… Cette réalisation simple est une réussite. Le madiran du château Peyros tradition 2011 lui allait bien.
Je ne te demande pas s’il te reste une petite place pour le dessert, je sais qu’il t’en reste toujours une énorme !
Plus que la faim, c’est la curiosité qui m’a guidé, encouragé par l’excellent Julien, vers une savoureuse sélection de fromages autochtones. La soif quant à elle était étanchée par un surprenant et élégant gaillac rouge 2012 du domaine des Terrisses de Brigitte et Alain Cazottes.
Pour finir, mes « suprêmes d’orange escortés de crémeux et sorbet mandarine, écume d’earl grey et biscuits frangipane » avaient la fraîcheur que mes papilles réclamaient, poliment, en silence.
Pas de fromages pour moi mais le même dessert, bien dans sa saison. Mais j’avais une tuile à la châtaigne en plus. Parfait pour clore un repas riche en goût et en calories même si je ne suis pas du genre à les compter ! Avec un verre de Touraine « Pointe d’agrumes » 2014 de FX Barck, un sauvignon sec qui relayait bien les notes du dessert.
Mais oh surprise : j’ai droit à une seconde douceur ! Heureusement que je viens de dire que les calories ne me faisaient pas peur ! Il s’agit d’un « Chocolat crémeux-mousseux-croquant, glace cacahuète, sel fumé et piment d’Espelette ». Heureusement, c’est plus léger en bouche qu’il n’y paraît à la lecture de l’intitulé. Je ne suis pas spécialement accro au chocolat mais là, ça « goûte » bien comme disent nos amis belges. Toutefois, peut-être que j’aurais préféré inverser les desserts. Encore que, les agrumes ont sans doute mieux préparé mon palais à cette onctuosité du chocolat que le sel et le piment décapent en finesse. Tout comme le verre de côtes catalanes Antithèse (100% syrah) 2011 du domaine Riberach.
On se quitte comme ça ?
Non ! Très bon café comme on n’en trouve que dans les bonnes maisons. À ses côtés, j’ai même rencontré un financier respectable ! Et par les temps qui courent…
Ha ! Ha ! Oui, très bon café ! Mon petit financier à moi a un cœur en chocolat coulant — de Bayonne of course — qui termine mon repas en point d’orgue, comme un baiser entre Paris et Bayonne !
Un mot plus général sur les vins Patrick ?
Une bonne sélection resserrée entre 20 et 40 € à Bayonne, 30 et 50 € à Paris, sur une carte qui fait la part belle aux bordeaux, au Sud-Ouest bien sûr mais aussi au Languedoc-Roussillon, à la vallée du Rhône. Quelques très jolis flacons à des prix hélas communément pratiqués par la restauration française. Mais ceci est une autre histoire qui ne doit pas gâcher notre plaisir du jour. Tous nos plaisirs !
Bon, ne vous le cachons pas, Patrick et moi sommes comme les pottoks : nous marchons à l’amble ! C’est donc avec un réel enthousiasme que nous attribuons conjointement — et c’est une première ! — un rond de serviette à chacune des tables de Sébastien Gravé : à Pottoka à Paris et à La table de Pottoka à Bayonne.
Invitation personnelle du chef.
Blandine & Patrick
Pottoka
4, rue de l’Exposition
75007 Paris
Tél : 01 45 51 88 38
Ouvert 7/7 jours
&
La table de Pottoka
21, quai Amiral du Bourdieu
64100 Bayonne
Tél : 05 59 46 14 94
Fermé mardi soir (jusqu’au printemps), mercredi et dimanche.
www.pottoka.fr