Dégustation à l'aveugle avec Paolo Basso, meilleur sommelier du monde 2013
Il est évidemment déraisonnable de ma part de tenter cet exercice en croyant pouvoir y obtenir un résultat suffisamment flatteur pour mon ego. Mais, à chaque occasion, je m’y prête avec le même enthousiasme et la même folle espérance d’un hypothétique miracle ! Aussi n’ai-je pas laissé passer cette opportunité de m’amuser à bon compte lors de la dégustation animée par Paolo Basso à Vinexpo, en compagnie d’une bonne centaine de participants venus du monde entier.
Atmosphère religieuse, attitude recueillie devant les rangées de verres mais narines et papilles relativement endormies après quatre jours d’activités intenses. Seules, l’envie et la bonne volonté peuvent me sauver du ridicule dans cette épreuve ingrate et relativement difficile. C’est le moment de se répéter en boucle la fameuse phrase censée amortir les échecs consternants : « la dégustation à l’aveugle, c’est l’école de l’humilité ! ».
On croit savoir et puis au bout d’une heure, on a la preuve qu’on ne sait pas grand chose et que tout s’est embrouillé dans les boyaux de la tête ! La couleur me permet de faire le malin auprès de ma voisine : « c’est du rouge… et je m’y connais ! » Malheureusement, ladite voisine est une éminente blogueuse qui esquisse un rictus exprimant plus sa politesse que son admiration béate. Paolo (qui avait absolument tenu à poser à mes côtés comme vous l’aviez déjà compris) nous invite à regarder de plus près le premier des dix verres alignés devant nous. Ses appréciations sont censées nous conforter dans les nôtres. Au lieu de ça, le doute nous envahit, les mines se renfrognent, les regards se portent vers le ciel afin d’y trouver de l’aide puis se concentrent sur le liquide inconnu, muet…
Moi qui connais sur le bout des doigts (évidemment) les caractéristiques de tous les cépages plantés dans tous les pays civilisés, eh bien je rame, j’hésite… ça y est, j’ai trouvé : « bon sang, mais c’est bien sûr ! » Allez, au suivant ! Le temps passe vite, les certitudes se font rares :
— Tiens, on dirait bien une syrah australienne…
— Zut, c’est déjà le troisième vin que je situe en Italie…
— Et si c’était un chasselas ? On n’a pas encore goûté de vin suisse…
Attention, on va bientôt ramasser les copies ! Alors, je rature, je tergiverse et puis je lâche ma feuille à regret : « alea jacta est » comme dit Najat Vallaud-Belkacem après chaque campagne électorale.
L’oracle commence à nous expliquer pourquoi nous nous sommes beaucoup trompés et nous fait penser que notre place n’était pas forcément dans cette enceinte respectable. Les évidences changent de côté, les remises en question sont douloureuses : le sauvignon de Nouvelle-Zélande est en fait un verdejo de Rueda, mon chablis si évident s’est mué à mon insu en chassagne-montrachet, l’indiscutable grenache du Priorat révèle plutôt un malbec argentin et ce que j’avais identifié comme un super toscan est un glorieux médocain…
Mes quelques bonnes réponses sont insuffisantes pour me redonner le sourire : le grec de Santorin et le pinot américain me laissent un goût amer. J’ai obtenu la moitié des points du vainqueur chinois habitant en Afrique du Sud ! Je suis effondré ! Je sors de la salle, tête basse.
C’est la dernière fois, juré (craché, c’est le cas de le dire !)… jusqu’à la prochaine !
Patrick de Mari
Michel Smith
22 juin 2015 @ 13 h 11 min
ça aurait pu être pire, Patrick. Il est vrai que la dégustation est une école d’humilité et il est fort probable que ton MSM aurait pu, lui aussi, se laisser couillonner. 😉