Café chaud ou cidre glacé ?
Le cidre éveille toujours en moi le même souvenir, émouvant car j’étais jeune mais douloureux car j’avais mal aux pieds !
Il y a plus de 40 années en arrière, une rentrée des « classes » m’accueillit dans une enceinte militaire, très militaire ! J’étais censé y devenir officier de réserve au bout de quatre longs mois de pratique intensive de l’art de la guerre. Entre Ploërmel et la forêt de Paimpont chère à Merlin l’enchanteur, les manœuvres s’enchaînaient dans un enthousiasme relativement tempéré…
Un matin à peine naissant, dans un camion secoué par les tremblements des troufions qui grelottent en dormant… Impossible de fermer l’œil… Le treillis trempé… L’eau qui s’insinue partout… Les pieds endoloris et sanguinolents dans des rangers dures comme du bois…
Alors, avec un compagnon d’insomnies et d’infortune, nous quittons à pas de loup ce dortoir de campagne avec l’ambition d’amadouer les habitants d’une ferme dont la cheminée fume déjà, afin de quémander du café chaud et peut-être même, faisons un rêve, une tartine beurre-confiture.
Casque sur la tête, fusil à l’épaule, dégoulinant d’un crachin ininterrompu depuis 3 jours, j’inspire confiance, c’est sûr !
L’homme qui ouvre la porte nous jauge immédiatement et nous entraîne dans la grange, décroche une saucisse sèche, vraiment très sèche, tellement sèche que nous en sucerons des morceaux comme des bonbons, sans jamais pouvoir les croquer ! Et pour les faire descendre, il nous remplit nos gourdes avec un cidre fermier, vraiment très fermier, tellement fermier qu’il nous fit rapidement le même effet qu’un déboucheur de tuyauterie bien connu.
Le retour de notre expédition fut piteux. Plus jamais je n’ai ingurgité ce genre de boisson particulièrement artisanale, à une température proche de 0°.
Mais depuis, j’ai bu de délicieux cidres de toutes régions ! J’en suis même devenu un consommateur compulsif dès la bouteille entamée et jusqu’à la dernière goutte.
Et, puisqu’on en parle, le cidre basque aurait peut-être mérité un peu plus qu’une demi-colonne sur 120 pages dans le « Guide de l’amateur de cidre du « Petit Futé ».