Les chemins de Compostelle – Sandrine Favre // Hemis
Les chemins de Compostelle
Grands voyageurs
Sandrine Favre (texte) Hemis (photos)
De lointaines études d’histoire de l’art, j’ai gardé deux passions : l’art roman et, subséquemment, le pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle, jalonné de ces édifices religieux dont j’aime tant l’imposante beauté, la pureté, l’histoire et la symbolique, en dehors de toute foi. Car ce qui me plaît dans le pèlerinage de Compostelle, c’est ce voyage incitant à l’introspection. Un voyage au sens propre doublé d’un cheminement intérieur au cœur de l’intime. Ce qu’on appelle un voyage initiatique en somme. Je ne peux m’empêcher de penser à ces hommes qui ont bâti ces églises pierre à pierre, à ce besoin de comprendre, à ces doutes taraudants. De l’homme à l’âme…
Ce grand pèlerinage de la Chrétienté dont l’existence remonte au IXe siècle a connu son âge d’or au XIIe siècle, puis une désaffection à partir du XIVe siècle à cause des épidémies de peste noire, de la guerre, des famines et de la montée du protestantisme. Il a retrouvé une vitalité incontestable à la fin du XXe siècle (vers 1980) et aujourd’hui il n’inspire plus seulement les croyants mais aussi tous ceux qui cherchent un dépassement de soi et veulent se ressourcer, se trouver ou se retrouver, que leur motivation soit l’exploit sportif, la découverte culturelle ou le recueillement.
Traversant des paysages aussi somptueux que riches en patrimoine architectural, les quatre voies historiques françaises — vers lesquelles afflue un réseau de routes venant des confins de l’Europe — confluent à la Puente la Reina, en Espagne, pour prendre fin à Santiago de Compostela : cette partie commune est ce qu’on appelle le « camino francès », sillonnant le nord de la péninsule ibérique.
Ces quatre voies sont le chemin de Tours (via Turonensis), le chemin de Vézelay (via Lemovicensis), le chemin du Puy (via Podiensis) et le chemin d’Arles (via Tolosana).
• Le chemin de Tours — le plus septentrional — part de Paris (de la Tour Saint-Jacques) et de Bretagne (Mont Saint-Michel), puis descend vers Tours, passe par Poitiers et le Poitou, Saintes et la Saintonge, Bordeaux et les Landes, puis le chemin du littoral (Bayonne).
• Le deuxième part de Vézelay. C’est celui que rejoignaient les pèlerins du nord-est de la France et de l’Europe. Traversé par de nombreux fleuves et rivières, il passe par Bourges, Nevers, Limoges, Périgueux et le Périgord et l’abbaye de Cluny.
• Le troisième est le chemin du Puy. C’est le plus fréquenté et il regroupe le réseau des routes d’Europe centrale. Il passe par Conques, Figeac, la route de Rocamadour, Cahors, Moissac.
• Le quatrième est le chemin d’Arles qui passe par Saint-Gilles, Saint-Guilhem-le-Désert, Toulouse et le Gers. Il est jalonné d’empreintes romaines.
Le passage des Pyrénées peut se faire par le col de Roncevaux, le col de Somport, ou le chemin du Piémont pyrénéen.
Au-delà de la frontière espagnole, le « camino francès » correspond au « camino aragonès » (chemin aragonais), traversant la Rioja, la région de Castille-Léon et la Galice pour arriver à Saint-Jacques-de-Compostelle où l’on fête l’apôtre Saint-Jacques.
Vous l’aurez compris, le grand but de l’aventure de Compostelle, ce n’est pas tant l’arrivée à Saint-Jacques mais le chemin car ils symbolisent l’ouverture au monde et aux autres, la découverte, le dépassement de soi, l’humilité et la solidarité.
Les chemins de Compostelle sont désormais inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.
Un petit guide pratique de voyage clôt l’ouvrage pour tous ceux qui rêvent de tenter l’aventure.
Enfin, pour ceux qui n’ont pas la vélléité de partir, sachez que ce livre est lui-même un voyage de par les magnifiques photos qui l’illustrent.
« Partir Partir
Même loin de quelqu’un
Ou de quelqu’une
Même pas pour aller chercher fortune
Oh partir sans rien dire
Vivre en s’en allant
Et en s’envolant
Et les gens l’argent
Seraient du vent
Mais c’est vrai le temps
Nous prend trop de temps… »
Chanson de Julien Clerc
Paroles de Jean-Loup Dabadie