La marmite… une belle hypocrite !

Malgré ses airs débonnaires, la marmite cache bien des mystères sous son couvercle ! Hypocrite marmite…
Qui ne connaît ce récipient en terre, en fonte, en cuivre ou en métal muni d’un couvercle ? Avec des pieds et une grande anse quand il est destiné à être suspendu dans la cheminée, à l’ancienne. Ou de manière plus contemporaine, sur le fourneau (cuisinière) et comportant alors deux anses latérales.

Mais sait-on que le mot marmite est un cache-misère qui en dit long sur les pratiques douteuses de certains cuisiniers ?
À l’origine (au XIIe siècle), le mot était en effet un adjectif qui signifiait… être hypocrite (faire le marmite, être marmiteux).
C’est au XIVe siècle que l’adjectif est devenu un nom et a pris une connotation culinaire… par allusion au fait qu’on peut faire mijoter bien des choses suspectes dans un chaudron muni d’un couvercle !
En vérité, à l’époque d’une France essentiellement paysanne, la chasse était un droit seigneurial interdit aux serfs (paysans asservis) et cette marmite était bien pratique pour cuisiner « en douce » les produits du braconnage. Mais peut-être ce surnom fut-il aussi donné à cause d’un aubergiste peu scrupuleux dont on n’ose imaginer avec quoi il faisait ses ragoûts.
En tout cas, il paraît que c’était la « marmite huguenote » (sans pieds) qui était considérée comme la plus hypocrite car on y faisait cuire les viandes sans bruit les jours maigres.

Le terme marmite serait lui-même une contraction de marmouser (murmurer) et de mite (chatte en ancien français, le mi de mite faisant allusion à l’onomatopée imitant le miaulement), par référence au murmure de la marmite qui mijote tranquillement sur les braises.
On retrouve d’ailleurs la même volonté de vouloir tromper son monde sous des aspects doux et flatteurs dans l’expression « faire la chattemite ».
D’un point de vue symbolique, la marmite (ou son compère le chaudron, en fonte ou en cuivre) évoque aussi la sorcière et toutes les potions secrètes qu’elle peut bien y mijoter.
Pour l’anecdote, notons qu’en espagnol, chaudron se dit calderon – qui signifie aussi rétameur – et que c’est aussi un patronyme, comme en atteste celui du dramaturge espagnol du XVIIe siècle, Pedro Calderon de la Barca (1600-1681).
En cuisine, on retrouve le mot marmite dans plusieurs recettes classiques ou régionales :
• Petite marmite : sorte de pot-au-feu à base de plusieurs morceaux de bœuf et de poule. Recette de Jules Gouffé, célèbre cuisinier du XIXe siècle.
• Marmite dieppoise : soupe de poissons « nobles » crémée : lotte, turbot et barbue (une belle sole pouvant remplacer l’une des trois espèces).
• Marmitako : au sens littéral, c’est le contenu de la marmite basque et, par extension, le nom d’un plat de pêcheurs à base de thon (Saint-Jean-de-Luz étant un port thonier important).